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REVUE DES DEUX MONDES.

Passé politique du Peuple allemand ; l’Esprit séparatiste dans le nouvel Empire allemand ; Tâche de la Prusse ; le Devoir national allemand, &c ; autant de chapitres où M. de Bülow retourne le problème : comment réconcilier l’esprit allemand et la monarchie prussienne ? comment imposer définitivement l’ordre prussien au désordre g germanique, l’État fédéral au tumulte des associations locales, l’Empire national aux revendications ou à la mauvaise humeur des peuples et des partis ? comment empêcher les gens de Prusse de « ne voir dans la vie politique de l’Allemagne du Sud qu’une dissolvante démocratie, » et les gens du Sud de « récuser, comme réactionnaire, la vie gouvernementale de la Prusse ? »

Puisque Prusse et Allemagne, Empire et Germanie sont inséparables pour la grandeur et la prospérité des deux contractans, ne pourrait-on pas imaginer qu’entre les libertés germaniques et l’autorité prussienne, quelque ajustement des droits et des usages gouvernementaux fit la part de chacun, sous l’arbitrage de la discussion publique et de l’intérêt général ? C’est la solution qu’en des problèmes analogues, ont adoptée toutes les nations occidentales, que sont en train d’adopter toutes les nations européennes : c’est ce que l’on appelle ici régime constitutionnel, ailleurs régime parlementaire.

En terres germaniques, répond M. de Bülow, ne croyons pas à l’efficacité d’un pareil arbitrage : « Ici encore, s’applique l’avertissement de Bismarck : ne pas chercher nos modèles à l’extérieur, du moment que nous ne possédons pas les antécédens et les qualités nécessaires pour imiter l’étranger. » L’État prussien, dont « la perte briserait la colonne Vertébrale de l’unité allemande, » a une nature spéciale qui ne s’accommode pas du régime parlementaire. Même on ne saurait plier ce rigide organisme prussien à des exercices d’assouplissement constitutionnel. À quoi bon, d’ailleurs ? « Ce qui nous fait défaut au point de vue politique, à nous Allemands, nous ne l’obtiendrons pas au moyen de modifications constitutionnelles : dans une représentation Commune de la nation, les forces allemandes ont plus de tendances à se disperser qu’à se grouper pour de grandes tâches nationales. »

On ne peut donc rien changer à la monarchie prussienne, ni au régime unitaire que Bismarck sut « magistralement » combiner pour « créer un ensemble solide, sans détruire l’ori-