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LE PASSE


La brume étend partout sa gaze diaphane.
De confuses rumeurs s’élèvent çà et là.
La Nature, assoupie et fragile, se fane
Sur les bords des sentiers d’où l’Amour s’envola.

Les bouleaux élancés mettent leur tache claire
Parmi les châtaigniers, dans l’air silencieux.
Sous ses dentelles d’eau l’heure est crépusculaire.
Et l’aube, sans lueur, n’anime pas les cieux.

L’âme est comme un parterre où la mélancolie
Promène ses langueurs et son rêve attristé.
Au milieu des rameaux qu’abandonne la vie
Et d’une amère et froide odeur d’humidité.

Et tous les souvenirs des jours enfuis, près d’elle,
Ainsi que les oiseaux de l’arrière-saison
Sur le seuil d’un logis, viennent battre de l’aile
Et pleurer sans retour sur leur défleuraison.


PIERRE DE BOUCHAUD.