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dominait les principales routes de retour vers l’Allemagne : l’une par les défilés de l’Argonne et le Luxembourg vers Trêves ; la seconde à l’Est par Nancy et la vallée de la Moselle ; et même une troisième au Sud-Est par Besançon et Belfort. À quelques kilomètres Nord-Est de Châlons se trouvait un vaste camp romain abandonné, camp destiné à couvrir les villes de Reims et de Châlons. C’est en prenant pour centre d’opération cette position retournée contre sa destination primitive qu’Attila se retrancha et fut défait. Il laissa là, dit-on, 160 000 morts ou blessés et battit définitivement en retraite vers le Rhin ; mais il continua à prétendre toujours qu’il n’avait pas été vaincu et réussit à le faire croire à son peuple…


Ce rapprochement historique suffirait déjà à rappeler combien la marche des armées est déterminée, dans ses grandes lignes, par la configuration du sol ; mais ce ne serait là qu’une vérité banale, si nous ne montrions pas maintenant, par l’exemple de la guerre actuelle, comment chaque étape, chaque point de combat correspond à des nécessités géologiques.

Dans son ensemble, la région que nous allons parcourir ainsi s’appelle, en géologie, le Bassin de Paris. Ne la confondons pas avec le Bassin de la Seine, qui en occupe seulement une partie. Nous apercevons aussitôt ici le désaccord qui existe entre la topographie et la géologie, assurant à la seconde science une portée beaucoup plus vaste qu’à la première. Le Bassin de Paris est un vieil élément constitutif de notre sol ; la manière dont nos rivières ont pu se distribuer est, au contraire, de date récente. Ainsi que nous l’avons déjà indiqué, certaines rivières qui appartiennent à ce bassin géologique ont trouvé moyen de s’en évader ou se sont laissé capturer par les fleuves d’un autre bassin. Tout le système hydrographique de la Loire en amont d’Angers appartient au Bassin de Paris. Le cours supérieur de la Meuse, de la Meurthe et de la Moselle s’y rattache aussi, comme la partie haute des rivières flamandes, de l’Yser ou de la Lys. L’unité de ce bassin parisien s’accuse de la manière la plus évidente, malgré ces anomalies hydrographiques, par les zones concentriques de terrains géologiques divers qui dessinent tout autour de lui une série d’auréoles, et que nos cartes ont l’habitude de peindre dans la gamme des bleus, des verts