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maritime. Enfin il a été capturé, mais il restait toute une escadre allemande, qui continuait d’évoluer dans le Pacifique et qui est passée dans l’Atlantique en contournant l’Amérique du Sud. C’est cette escadre qui, sur les côtes du Chili, avait réussi à couler le Monmouth et le Good Hope : elle se composait de cinq croiseurs, le Schanhorst, le Gneisenau, le Leipzig, le Nürnberg, et le Dresden, accompagnés du croiseur auxiliaire le Prinz-Eitel qui portait 300 hommes de débarquement. Une escadre anglaise, très utilement secondée par la flotte japonaise, s’était mise à leur poursuite sous les ordres de l’amiral Frédéric Surdee et l’a finalement atteinte aux Iles Falkland, au Nord-Est de la Terre de Feu. Tous les navires allemands ont été aussitôt coulés, à l’exception du Dresden et du Prinz-Eitel qui ont réussi à se sauver, provisoirement. À partir de ce moment, les mers ont été purgées de navires ennemis. Avons-nous besoin de dire quel avantage cela nous donne ? Et cet avantage, avec le temps, deviendra de plus en plus appréciable en rendant notre ravitaillement facile, tandis que celui de l’Allemagne deviendra à peu près impossible.

Elle sent cette infériorité très vivement et, ne pouvant pas s’en affranchir, elle cherche du moins à s’en venger. Ses sous-marins, qui sont eux aussi d’une belle audace, ont coulé quelques vaisseaux dans la Baltique et dans la mer du Nord. Ce sont là des faits de guerre ; mais que dire d’une entreprise aussi incorrecte et aussi stérile que celle qui consiste à profiter du brouillard pour s’approcher des côtes britanniques et d’y bombarder quelques villes ouvertes, pour le simple plaisir d’y faire des dégâts et de tuer ou de blesser un certain nombre d’habitans inoffensifs ? Les exploits de ce genre ressemblent à ceux que, pendant quelque temps, les taubes sont venus faire à Paris. Au point de vue militaire, le résultat est nul ; au point de vue humain, il est cruel et odieux. Les taubes allemands ont tué chez nous quelques passans ; les bateaux allemands en ont tué davantage en Angleterre. Il y en à Hartlepool, à Scarborough et à Whitby 122, tués, dont 6 seulement étaient des combatlans, et 549 blessés : parmi les tués, 57 étaient des femmes et des enfans. À Paris, une bombe est tombée sur la cathédrale, sans l’endommager gravement. En Angleterre, une vieille abbaye a été plus maltraitée. On reconnaît la manière germanique dans ces actes de pure barbarie, qui n’ont d’autre objet que de répandre l’épouvante et ne l’atteignent d’ailleurs pas : ils provoquent seulement la colère et l’ardeur à se défendre. Quelle peut être l’intention des Allemands dans l’accomplissement de pareils actes ? Quelle explication