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que l’on fait souffrir par plaisir, mourir lentement, sont des vieillards, des femmes, des adolescens, des petits… Arrivant à Averbode, le 20 août, ils voient une femme qui, prise de peur, se cache dans un fossé : ils la tuent à coups de lance. À une heure de là, à Schaffen, ils éventrent une jeune fille de vingt ans. Des paysans des environs de Louvain accourent à Anvers, le 12 septembre, et racontent qu’à Wilsele les Allemands ont voulu brûler vifs la femme Van Kriegelingen et ses onze enfans. « La femme et huit enfans ont été carbonisés, deux ont pu fuir, le dernier a été fusillé dans la rue. Nous avons vu les cadavres de la mère et des enfans et nous avons assisté à l’exécution. » Le général Deruette, aide de camp du roi Albert, a vu, à Hofstade, le cadavre d’une vieille femme percée par jeu de dix coups de baïonnette ; elle tenait encore en main l’aiguille et le bout de fil avec lequel elle cousait. Dans le même village, une paysanne cherche une jeune fille disparue : elle la trouve pendue à un arbre. Le canonnier volontaire De R. décroche du sol les cadavres d’une femme et de son enfant, cloués à la terre par des baïonnettes. Interrogé sur ce qui s’est passé à Boortmeerbeek, le docteur V., de Malines, dépose : « L’épouse van Rollegem est arrivée à l’hôpital de Malines, le 22 août. Le jeudi 20, fuyant de Boortmeerbeek avec son mari, elle fut atteinte par deux coups de feu à la jambe. Elle se jeta dans un fossé pour se mettre à l’abri. Quelques instans plus tard, les Allemands qui avaient tiré sur elle la rejoignirent et lui firent des plaies horribles à la cuisse gauche et à l’avant-bras gauche. Elle demeura ainsi sans secours jusqu’au samedi soir. Les plaies étaient infectées, les vers y grouillaient. » Dans la nuit du 23 au 24 août, des soldats frappent violemment à la porte du château de Canne, chez M. Poswick. Mme  Poswick ouvre la porte : elle est aussitôt assommée à coups de crosse. M. Derrickx, député permanent du Limbourg, qui s’était réfugié au château, arrive à son tour, portant un enfant sur les bras : on le transperce de vingt lances. Le dimanche 30 août, une patrouille de hussards, en guise de distraction dominicale, s’amuse à tirer, chaussée de Bruxelles à Malines, sur une femme de soixante-quatorze ans, Catherine van Kerchove, partout où ils peuvent l’atteindre sans la tuer : un coup de fusil lui emporte la main droite, un autre lui déchire la joue. À Battice, avant de brûler les maisons, les Alle-