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alliée. Il reconnut ensuite que l’Autriche-Hongrie pouvait accepter la proposition anglaise, car il s’agissait d’une médiation des Grandes Puissances entre la Russie et l’Autriche-Hongrie, et non pas d’une médiation entre l’Autriche-Hongrie et la Serbie. Il déclara donc l’approuver[1].

Sir Edward Grey avait eu raison de faire sans retard cette démarche auprès de l’ambassadeur d’Allemagne, car ses prévisions pessimistes du premier moment ne tardèrent pas à se réaliser. Le 25, le ministre d’Autriche-Hongrie quittait Belgrade. La rupture des rapports diplomatiques entre la Serbie et l’Autriche-Hongrie était un événement d’autant plus grave que la Serbie avait donné à la note autrichienne une réponse beaucoup plus conciliante que les Puissances de l’Entente n’avaient espéré. Elle avait accepté la note autrichienne presque complètement. Si l’Autriche n’avait pas trouvé cette réponse satisfaisante, sous prétexte qu’elle ne pouvait croire à sa sincérité, c’est qu’elle voulait faire la guerre et troubler l’équilibre des Balkans. Ce fut la conclusion de beaucoup de spectateurs désintéressés[2]. En attendant, deux jours avaient passé ; les chancelleries avaient beaucoup causé, mais n’avaient rien conclu ; comme Sir Edward Grey l’avait prévu, l’Autriche-Hongrie commençait à mobiliser une partie de son armée[3] ; et la Russie prenait des dispositions préparatoires pour mobiliser à la frontière autrichienne[4]. Il fallait donc agir sans retard. Le 26, Sir Ed. Grey soumit aux cabinets de Rome, de Paris et de Berlin une proposition officielle. Les ambassadeurs de France, d’Italie et d’Allemagne devaient s’unir à Londres avec lui en conférence pour trouver une solution pacifique du conflit ; et ils demanderaient à Belgrade, à Vienne, et à Saint-Pétersbourg de suspendre toutes les opérations militaires, tant que la conférence siégerait[5]. Le même jour, M. Sazonoff élaborait un autre projet : celui d’une conversation directe entre Vienne et Saint-Pétersbourg. Il télégraphiait, le 26, à l’ambassadeur de Russie à Vienne[6] :


J’ai eu aujourd’hui un long entretien sur un ton amical avec l’ambassadeur d’Autriche-Hongrie. Après avoir examiné avec lui les dix demandes adressées à la Serbie, j’ai fait observer qu’à part la forme peu habile sous

  1. Greal Br., doc. n. 25 : Livre Orange, doc. n. 22.
  2. Great Br., doc. n. 41.
  3. Livre Orange, doc. n. 24.
  4. White German Book, doc. n. 23 a.
  5. Great Br., doc. n. 36.
  6. Livre Orange, doc. n. 25.