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27 à 28 nœuds, prend 1 200 tonnes de combustible et s’arme de 12 canons de 105 millimètres, tandis qu’il protège son flanc de 100 millimètres d’acier, sans avoir perdu pour cela les 50 millimètres que ses prédécesseurs avaient sur leur pont. Le Graudenz, que l’on achève en ce moment, pousse jusqu’à près de 5 000 tonnes, ce qui le rapproche de la classe des croiseurs protégés anglais de 2e classe, navires de 5 250-5 600 tonnes, à laquelle appartient justement le Sydney, qui a victorieusement combattu l’Emden.

On sait les « exploits » de ce dernier croiseur, dans la mer des Indes. Le plus remarquable, au point de vue exclusivement militaire, est la surprise du Jemtschoug et du Mousquet à Poulo²Pinang, le 28 octobre, au point du jour. L’Emden s’était maquillé. Il battait pavillon russe, disent les uns, pavillon japonais, disent les autres. Le pavillon japonais est mieux indiqué parce que ni le Jemtschoug, ni le Mousquet ne pouvaient guère exiger d’un croiseur de cette nationalité l’échange obligatoire et évidemment indispensable des signaux de reconnaissance. Mais si de telles ruses sont permises, — disons plutôt tolérées, — dans la marche d’approche, il est absolument interdit de commencer le combat sous un autre pavillon que celui de la nation à laquelle on appartient. Cette condition essentielle d’une lutte loyale a-t-elle été remplie par l’Emden ? Nous l’ignorons, et j’estime que les Anglais feront bien de s’en assurer avant de faire au commandant du croiseur allemand l’accueil flatteur qu’ils réservent généreusement à l’ennemi qui leur fit, dit-on, pour 70 ou 80 millions de prises… mais qui est enfin réduit à l’impuissance.

Tandis que l’Emden était détruit par le Sydney, notablement plus fort que lui, aux îles des Cocos, en plein Océan Indien, le Königsberg, toujours du même type, était enfermé dans le Rufidji par le Chatham, frère jumeau Au Sydney. Je ne serais pas étonné que le Karlsruhe, à son tour, éprouvât quelque mésaventure avec un autre bâtiment de cette classe « des villes anglaises » qui apparaît nettement supérieure à celle « des villes allemandes. » Et il en sera peut-être de même du Berlin[1], qui

  1. Les télégrammes parlent du croiseur auxiliaire « Berlin. » En réalité, il y a, dans la liste des bâtimens auxiliaires de la flotte militaire allemande, un navire de ce nom ; mais c’est un transport, paquebot de 29 000 tonnes et 18 nœuds seulement, de la Compagnie de Brème Norddeutscher Lloyd. Je ne pense pas qu’il s’agisse de ce bâtiment, mais bien du croiseur de guerre « Berlin. »