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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




Les nouvelles de la guerre ne changent pas beaucoup dans l’Europe occidentale, mais elles continuent d’être rassurantes. On peut prendre presque indifféremment l’un ou l’autre des communiqués officiels qui se sont succédé deux fois par jour depuis le commencement du mois ; ils se ressemblent tous et tous entretiennent la confiance. « Au Nord, dit l’un d’eux, l’ennemi parait avoir concentré son activité dans la région d’Ypres, sans résultat d’ailleurs ; nous tenons partout. » Nous tenons partout : plus tard, nous procéderons autrement et nous frapperons à un point bien choisi des coups plus décisifs. Pour le moment, on prête au général Joffre un mot qu’il n’a peut-être pas prononcé, mais qui définit assez exactement son action ; il aurait dit : « Je suis une râpe. » Il use, en effet, peu à peu l’adversaire ; il le fatigue et l’épuisé ; il lui enlève chaque jour un morceau de terrain. Au bout de chaque quinzaine, l’amélioration est notable. Toutefois, la guerre sera longue. Par une sorte d’instinct divinatoire, l’opinion publique a compris dès le début qu’elle exigerait de notre part beaucoup de patience : nous en avons donc fait ample provision.

Où en sommes-nous aujourd’hui ? Il y a quelques jours, les attaques allemandes étaient la manifestation d’un plan défini dont l’objet apparaissait distinctement. L’Empereur avait donné Calais pour but à son armée et il se proposait de l’atteindre en forçant à tout prix ou en tournant notre extrême gauche le long du rivage de la mer. Malheureusement pour elle, l’armée allemande a trouvé l’Yser sur le chemin de Calais. Tous ses efforts sont venus se briser contre la résistance que les Belges, les Anglais et nous leur avons opposée là et qu’ils n’ont pas pu vaincre. On sait que la mer s’est armée contre eux comme la terre. La flotte anglaise et les forces maritimes que nous avons conservées dans les mers du Nord ont utilement collaboré avec nos armées,