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REVUE LITTÉRAIRE

LE RETOUR A LA CULTURE FRANÇAISE

L’Université de France vient de donner un magnifique exemple de dignité professionnelle, de dévouement à sa tâche et de sérénité. Elle a tenu à honneur que les études reprissent à la date habituelle dans tous les ordres d’enseignement. Sans se laisser troubler par la crise terrible que traverse le pays, elle y a pris seulement une conscience plus nette que jamais de son devoir, et puisé une nouvelle ardeur pour l’accomplissement de sa mission éducatrice. Ainsi elle est restée fidèle à sa propre tradition. Celui qui écrit ces lignes se souvient d’avoir fait sa première année de collège dans Paris assiégé. En 1870, nos maîtres portaient le képi de la garde nationale ; entre deux factions, ils nous enseignaient le grec et le latin, et ils l’enseignaient comme ils le savaient : admirablement. En 1914, tous les professeurs en âge de porter les armes ont été mobilisés, beaucoup d’étudians sont au front ; il y a bien des vides et des deuils cruels ; mais jamais, à aucun moment, aux heures les plus troubles, l’Université n’a admis qu’aucun de ceux qui ont l’honneur de lui appartenir ne fût pas à son poste. Empressons-nous de dire qu’il en a été de même dans les maisons d’enseignement libre. Et c’est une preuve de plus de notre magnifique union française.

La première leçon a été tirée des événemens eux-mêmes : une décision ministérielle avait prescrit aux professeurs d’inaugurer leur enseignement par des paroles destinées à graver profondément dans l’esprit des enfans le souvenir de cette « première classe » ouverte au milieu de circonstances si tragiques. Ce fut très noble et très émouvant. Depuis lors, une circulaire du recteur de l’Académie de Paris, M. Liard, les a invités à lire devant leurs élèves cet article du