Page:Revue des Deux Mondes - 1914 - tome 24.djvu/16

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

a monté la façade de la nef jusqu’à la galerie des Rois, et ces travaux ont dû être achevés vers 1285 ; au XIVe siècle, on a travaillé aux parties latérales formant le premier étage des tours, puis à la galerie des Rois, au pignon et à l’étage supérieur des tours, achevées seulement vers 1427. »

Après la façade principale, il faut admirer les façades latérales, surtout celles de l’abside[1]. Le décor des façades latérales fut toujours une des pierres d’achoppement de l’art gothique. Les gothiques eurent grand’peine à faire un ensemble harmonieux avec tout cet échafaudage d’arcs-boutans qui entouraient les nefs, semblables aux pattes d’un gigantesque insecte., Une des plus belles solutions fut donnée à Reims, grâce à de légères galeries à jour et à la finesse des arcs-boutans qui se terminent par des tabernacles enfermant de belles statues d’anges aux ailes éployées.

A Reims, les sculptures sont très nombreuses. Les plus anciennes, celles des portes du transept nord et de la porte de droite de la façade principale, sont encore conçues dans les traditions romanes, avec toute la noblesse et la gravité de cet art, mais en même temps leur style archaïque. Le sculpteur, comme on le fit longtemps dans les premiers siècles du moyen âge, semble se désintéresser des proportions normales des corps, pensant que toute l’attention doit être concentrée sur la tête, organe de la pensée.

Cet archaïsme, par contraste, rend plus belles encore les statues qui décorent la façade, surtout celles de la porte centrale qui sont le point culminant de la sculpture gothique. Les statues du portail central sont au nombre de huit : à droite, les deux statues de l’Annonciation et les deux statues de la Visitation ; à gauche, les quatre statues de la Présentation au Temple.

Dans cet ensemble, deux statues ont un caractère particulier et tout à fait anormal, ce sont celles de la Visitation, qui sont de véritables copies d’œuvres antiques et, de ce chef, elles ont toujours retenu particulièrement l’attention critique. Certes, tant que la critique n’a eu d’autre pensée que de prendre les statues antiques comme critérium de toute beauté et de n’admirer que les imitations qu’on en a pu faire, quelque maladroites qu’elles aient été, on conçoit que l’on ait attribué une importance

  1. La cathédrale de Reims a été commencée en 1221. L’abside était terminée en 1241.