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statistiques, etc., de l’Allemagne du Sud. Il voulait les fédérer à Francfort en un bureau commun, qui ne serait qu’une branche des sociétés et académies berlinoises.

En troisième lieu, la presse : « L’Autriche, disait Bismarck, envoie de ses diplomates faire l’article dans les feuilles allemandes, comme pourraient faire des voyageurs de commerce et conclure avec les plus importantes des marchés pour subventions, insertions et communiqués : »


La tâche principale de cette presse mercenaire, poursuivait Bismarck, est de représenter l’Autriche comme la protectrice exclusive des intérêts allemands et de l’unité allemande et comme la seule puissance capable de réaliser la partie saine et raisonnable des idées qui ont agité le peuple durant la période révolutionnaire.


On sait quelle organisation Bismarck sut donner à la Prusse « pour se défendre contre cette propagande systématique des journaux, » quels soins il apporta toujours à ménager, à préparer, à gagner l’opinion de l’Allemagne et du monde par le canal de la presse et, quand on relit à cinquante ans de distance les plus patriotes de nos journaux, on reste confondu de l’habileté avec laquelle il mania notre opinion française durant cette période de 1864 à 1866, où se jouait la destinée de l’Autriche, où se préparait la destinée de la France.

Mais les mots, pensait Bismarck, ne suffisent pas : il faut les intentions et les actes, et des actes conformes aux sentimens de l’humanité, aux aspirations des peuples, aux besoins de la nation. En arrivant à Francfort, Bismarck était un conservateur entêté ou du moins passait pour tel, et c’est comme tel qu’il avait gagné le cœur de son roi Frédéric-Guillaume IV, comme tel qu’il avait été nommé à la Diète pour aider l’Autriche en son œuvre de réaction. Il avait la haine de la Révolution et le mépris des révolutionnaires. Il savait que « la puissance du gouvernement est plus forte et plus solide en Prusse qu’en tout autre pays du monde et qu’aussi longtemps que Sa Majesté saura donner des ordres, on obéira. » Il allait plus loin : « Au risque d’être regardé comme un renégat de la Constitution, » il proclamait qu’ « à certaines heures un coup d’Etat pour supprimer toutes garanties constitutionnelles était non seulement souhaitable, mais nécessaire. »

Mais « les gouvernemens ne doivent pas négliger les enseignemens