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pourra créer un demi-milliard de billets nouveaux, garantis, jusqu’à concurrence de 60 pour 100, par de l’or et de 20 pour 100 par de la monnaie d’argent. La Norvège a établi un moratorium général d’un mois et dispense sa banque d’émission de l’obligation de rembourser ses billets en espèces. À Constantinople, des banques allemandes et autrichiennes ont suspendu leurs paiemens ; un moratoire d’un mois a été proclamé.

L’Amérique du Sud est très éprouvée. À Rio de Janeiro, le gouvernement vient d’émettre 300 millions de milreis (environ un demi-milliard de francs) de billets. De ce montant, 200 millions seront retirés graduellement au moyen d’un prélèvement de 10 pour 100 sur le produit des douanes fédérales ; 100 millions sont avancés aux banques, qui devront les rembourser au plus tard le 31 décembre 1915. Un moratoire de trente jours, pouvant être porté à cent vingt jours, a été décrété. En Argentine, le moratoire a été voté pour un mois, et la Caisse de conversion fermée pour un délai égal, susceptible d’être doublé par le pouvoir exécutif. En Bulgarie, le Sobranié a voté un moratoire de trois mois. En Égypte, il a été fixé au 15 septembre ; les banques sont autorisées à ne rembourser que 5 pour 100 des dépôts.

V

Nos lecteurs nous pardonneront de leur dire que ce n’est pas sans un effort énergique de volonté qu’il nous a été possible de rédiger en ce moment un article économique. Nous l’avons fait par esprit de devoir et parce que nous pensons que chaque Français doit s’efforcer de travailler dans sa sphère, et d’aider, dans la mesure où il le peut, à ce que la vie nationale ne soit pas trop complètement interrompue.

Nous voudrions profiter de cette occasion pour adjurer nos compatriotes, lecteurs de la Revue et autres, de garder leur sang-froid dans l’épreuve que traverse notre pays et de laquelle il sortira, nous en avons la ferme conviction, fortifié et ennobli.

Il ne faut pas que les mêmes hommes qui donnent un si admirable exemple de dévouement à la patrie en lui offrant joyeusement leur vie et celle des êtres qui leur sont le plus chers, perdent leur calme en face d’une situation financière qui est