Page:Revue des Deux Mondes - 1914 - tome 23.djvu/338

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


II

Parmi les facteurs de la vie économique aux Etats-Unis, les chemins de fer sont au premier rang. On peut dire qu’ils ont fait le pays : les 400 000 kilomètres de voie qui le sillonnent ont ouvert à l’agriculture et à l’industrie les magnifiques territoires qui s’étendent de l’Atlantique au Pacifique. Sans la locomotive, qui emporte vers les deux océans les céréales et le coton, les minerais et le pétrole extraits de ce sol privilégié, la prospérité de la Confédération ne saurait se concevoir. Les chemins de fer ont été exclusivement l’œuvre de sociétés particulières. Les actions de ces sociétés ont été, pendant longtemps, l’objet principal des échanges à la Bourse de New-York, L’attention du monde a été attirée sur elles. Après avoir fait concevoir des espérances excessives à ceux qui les avaient acquises, elles ont, depuis quelques années, subi une baisse notable et provoqué des inquiétudes parmi les porteurs indigènes et étrangers.

Le chiffre des capitaux engagés dans cette industrie est tel que, même à l’heure où les rapports internationaux dominent la situation économique jusque dans les pays neutres, il convient de dire un mot d’une question d’ordre intérieur, vitale pour l’industrie des chemins de fer. La Commission dite du « commerce entre Etats, » chargée d’examiner et de trancher les problèmes de cette nature, avait été, en dernier lieu, saisie d’une demande de relèvement de tarifs, émanée d’un certain nombre de Compagnies. Celles-ci ont, toutes, vu leurs frais d’exploitation s’élever depuis nombre d’années, si bien que, en dépit d’augmentations sensibles des recettes brutes, le produit net ne cesse de décroître. Les dividendes baissent ou disparaissent ; dans certains cas, le coupon des obligations est lui-même menacé. Par une décision du 1er août 1914, longuement motivée, la Commission du commerce entre Etats a donné satisfaction à un certain nombre des réclamations qui lui étaient adressées ; elle en a rejeté d’autres. L’ensemble du résultat obtenu ne peut pas encore être clairement dégagé. Le point important est que les autorités ont enfin reconnu que les tarifs de chemins de fer peuvent, le cas échéant, être relevés et que les transporteurs, comme les autres industriels, ne sauraient travailler indéfiniment à perte. La conclusion de la sentence est très nette à cet