Page:Revue des Deux Mondes - 1914 - tome 23.djvu/216

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

traiterait que les affaires du Danemark. La proposition de Napoléon III était ainsi tombée dans l’eau et, bientôt après, une offre de médiation faite par l’Angleterre allait avoir le même sort. La Prusse et l’Autriche, pendant ce temps, poursuivaient l’exécution de leurs desseins à travers de multiples incidens qui devaient les brouiller et les armer, en 1860, l’une contre l’autre. Tel est en résumé l’événement dans lequel les membres de la Commission dont l’œuvre est sous nos yeux ont placé le berceau de la guerre de 1870.

Ils ne se dissimulent pas qu’il y a dans leur choix une certaine part de convention. Mais ils font justement remarquer que la période à laquelle ils se sont arrêtés est celle où, dans la confusion où l’Europe se trouva tout à coup jetée, commencent à se révéler les mobiles et les ambitions du gouvernement prussien. D’autre part, en remontant plus haut pour retrouver les origines de la guerre, ils eussent rencontré sur leur route des événemens qui, par des étapes successives, les auraient ramenés de siècle en siècle jusqu’au plus lointain passé. Notre histoire nationale n’est-elle pas alimentée à tout instant par les rivalités de la France avec l’empire allemand ?

Il faut cependant constater qu’encore aujourd’hui, les historiens ne sont pas entièrement d’accord sur la date à laquelle il convient de placer les origines de la guerre. L’un d’eux et non des moindres, Emile Ollivier, est d’avis « qu’on a démesurément grossi cette affaire du Danemark en la présentant comme la source d’où sont sortis tous nos maux et qu’il n’y a aucun lien nécessaire entre 1863 et 1870. » Peut-être est-ce trop dire, et serait-il plus juste de reconnaître que si le gouvernement impérial commit, en 1863, la très lourde faute de laisser l’Autriche et la Prusse comploter ensemble et porter la plus grave atteinte à l’intégrité de la monarchie danoise garantie par le traité de 1852, il commit, en 1866, une faute plus lourde encore en laissant la Prusse écraser l’Autriche. N’est-ce pas surtout de cette faute que nous avons subi trop longtemps les douloureuses conséquences ? Sans insister autrement sur la question de savoir à laquelle des deux dates précitées est la source de nos malheurs, il est aisé de mettre d’accord les opinions contradictoires en rappelant que, de 1863 à 1866, ont été commises de notre côté des fautes irréparables et qu’en conséquence, si l’on veut s’en tenir aux causes immédiates de la