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l’intégrité de la monarchie de Danemark, et garantissaient en outre à la maison royale l’ordre de la succession au trône, telle qu’elle l’avait réglée. Malheureusement, quelques années plus tard, le conflit que la diplomatie européenne s’était flattée d’apaiser, renaissait à la suite des récriminations des populations allemandes établies dans les duchés, à qui les réformes réalisées semblaient insuffisantes. La Diète germanique était alors intervenue par les armes pour soutenir leurs prétentions, ne parlant de rien moins que de détacher des Etats danois, contrairement au traité de 1852, les deux provinces qui donnaient lieu au litige et d’en faire un Etat autonome sous le gouvernement du duc d’Augustenbourg, Les troupes fédérales venaient d’y entrer sans rencontrer de résistance, lorsque, se substituant à la Diète malgré ses protestations, l’Autriche et la Prusse s’étaient arrogé le droit, qui n’était que le droit du plus fort, d’avoir seules raison de l’opposition du Danemark. Au mois de janvier 1864, après des combats sanglans, elles occupaient les duchés et, si l’Autriche semblait disposée à s’en remettre pour leur sort aux décisions de la Diète, la Prusse laissait percer le dessein de ne s’en dessaisir ni pour les abandonner au duc d’Augustenbourg, ni pour les restituer au Danemark.

Antérieurement à cette date, et lorsque la crise qu’elle rappelle venait aggraver les alarmes de l’Europe, déjà troublée par l’insurrection polonaise et par les visées de l’Italie sur la Vénétie et sur Rome, l’empereur Napoléon avait, le 4 novembre 1863, proposé aux Puissances la réunion à Paris d’un Congrès où toutes seraient représentées. Pour justifier sa proposition, il faisait valoir que l’édifice politique de l’Europe, élevé à Vienne en 1815, s’écroulant de toutes parts, il était urgent de lui en substituer un autre, c’est-à-dire « de régler le présent et d’assurer l’avenir » sur des bases plus justes et plus propres à garantir la paix. Un grand Congrès, où toutes les questions politiques seraient discutées et toutes les difficultés résolues dans un intérêt commun, pouvait seul accomplir cette tâche pacificatrice. Sauf l’Angleterre et l’Autriche, tous les gouvernemens, avec ou sans réserves, s’étaient montrés favorables au projet de l’Empereur. L’Angleterre l’avait écarté par un refus formel. Quant à l’Autriche, tout en reconnaissant l’utilité de cette réunion, elle n’y voulait participer qu’à la condition que les Puissances signataires du traité de 1852 y seraient seules admises et qu’on n’y