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devra alors faire face de plusieurs côtés à la fois. C’est dans cette obligation qui, tôt ou tard, s’imposera à elle que nous avons puisé, dès le premier jour, notre confiance dans la victoire finale, et cette confiance n’est pas diminuée.

Si nous pouvions douter, si notre foi pouvait défaillir, nous serions réconfortés par l’inflexible volonté de nos alliés. Celle de la Russie se manifeste par la marche victorieuse de son armée dans la Prusse orientale, et celle de l’Angleterre, non seulement par la présence d’une armée anglaise à côté de la nôtre, mais par le langage que lord Kitchener, ministre de la guerre, a tenu à la Chambre des lords. « Tandis, a-t-il dit, que les autres pays engagés dans cette guerre ont réussi par la conscription à amener sur le champ de bataille toutes leurs ressources d’hommes, nous, avec notre système colonial, nous n’avons pas pu le faire, et par conséquent nous pouvons encore faire appel à une réserve énorme, tirée non seulement de la mère-patrie, mais de l’Empire britannique au delà des mers. Tandis que les Indes, le Canada, l’Australie et la Nouvelle-Zélande nous envoient des forces puissantes, en Angleterre les troupes territoriales répondent loyalement à l’appel d’un devoir exceptionnellement pressant. Avec un beau patriotisme, soixante-dix bataillons se sont déjà offerts pour servir à l’étranger. Les 100 000 recrues que l’on croyait nécessaire de demander en premier lieu ont déjà répondu. Derrière celles-ci nous avons nos réserves. Les empires avec lesquels nous sommes en guerre ont appelé sous les drapeaux presque toute la population mâle. Le principe que nous suivons est que, tandis que leur force maximum subit une diminution constante, les renforts que nous préparons s’écouleront lentement, en augmentant jusqu’à ce que nous ayons une armée en campagne qui, tant par le nombre que par la quahté, sera digne de la puissance et des responsabilités de l’Empire britannique. L’effectif de campagne que nous constituons actuellement est considérable et peut arriver, pour la durée des six ou sept prochains mois, à un total de trente divisions maintenues continuellement en campagne. Je ne puis pas dire aujourd’hui que cela sera la limite des forces nécessaires : mais si la guerre était longue et ses fortunes diverses, des sacrifices au delà de tout ce qui a été jamais demandé deviendront indispensables, et nous sommes sûrs que ni le Parlement ni le peuple ne se refuseront à les faire. » Rien de plus simple, mais aussi de plus grand que ce langage. C’est la plus fière réponse que l’Angleterre pouvait faire à l’avantage provisoire que l’Allemagne avait