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L’ART DE LA RÉVOLUTION FRANÇAISE[1]

J’avais d’abord pris pour titre de cette étude : « Le néo-classicisme, » et ma première phrase avait été : « Le néo-classicisme est le style qui succède au style Louis XV ; » mais je ne tardai pas à m’apercevoir que c’était là une proposition inexacte, ou tout au moins trop superficiellement énoncée ; car ce caractère de néo-classicisme par lequel on définit ordinairement l’art qui prit naissance dans la seconde moitié du XVIIIe siècle est bien loin d’en être le trait essentiel et distinctif.

Pour comprendre cet art, pour savoir ce qu’il a été, il vaut mieux le désigner autrement et lui donner son vrai nom, celui d’Art de la Révolution française. L’art de la seconde moitié du XVIIIe siècle, en effet, a été l’art de la Révolution. Tout ce que la Révolution a fait, tout ce qu’elle a voulu, surtout tout ce qu’elle a rêvé, voilà ce que cet art a exprimé, voilà ce qui constitue son essence, son fonds propre, la source féconde de toutes ses inspirations. Si nous voulons en définir les caractères principaux, nous ne les chercherons pas dans des formes extérieures, dans des apparences plus ou moins superficielles, mais dans les idées maîtresses qui ont fait la Révolution elle-même.


I. — CARACTÈRES GÉNÉRAUX DE L’ART DE LA RÉVOLUTION


§ I. CARACTÈRES PROPRES À CET ART : IDÉALISME, MORALITÉ, ÉNERGIE, SIMPLICITÉ

La Révolution fut une profonde réforme sociale, un mouvement de haute moralité fait en vue de corriger les abus et les

  1. Cet article est la suite et la conclusion des articles parus dans la Revue des 1er janvier 1910, 15 mars et 15 mai 1912.
    Au nombre des livres que l’on peut consulter utilement sur l’Art de la Révolution