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tour telle ou telle partie de leur sujet et d’enrichir la tradition de certaines observations et de certaines idées mieux élucidées que par le passé. C’est à la fois aux maîtres et aux élèves d’y mettre un peu du leur. L’harmonie est plus facile à réaliser là où l’enseignement secondaire classique est déjà bien vivant et où alors des notions générales sont aisément complétées, au bout d’un an ou deux d’université, par les applications, par les concordances logiques qui agrandissent et illuminent la partie des études choisies. Est-ce là le cas en Italie ? Qu’on en juge !

La philosophie, — on le voit par le nombre des chaires, — aspire à tenir une place prépondérante dans l’enseignement supérieur de la nation. Et il est certain qu’une culture philosophique sérieuse doit faire sentir heureusement son action sur la culture même des autres sciences, comme la médecine, comme le droit, comme l’histoire, comme la littérature. Malheureusement, la préparation philosophique des écoliers se fait d’une façon bien terre à terre. Au lieu d’occuper une année entière, une année où l’unité de l’enseignement permettrait de suivre les principes et les conséquences, en excitant et en satisfaisant tour à tour une curiosité d’un ordre élevé, la philosophie des classes est coupée en trois expositions, en troisième, en seconde, en première. Ce n’est pas là une méthode où l’esprit philosophique ait rien à gagner, puisque chacun de ces trois fragmens d’expositions n’a plus dans chacune des trois années qu’une place subalterne et presque sacrifiée. Encore a-t-elle eu là quelque place ; mais qu’il plaise à un professeur de droit civil de consacrer ses neuf mois de cours à la question du divorce, à un professeur d’histoire de l’art de traiter exclusivement de l’art bolonais, l’étudiant sera dispensé, pour ne pas dire empêché de faire ses preuves sur la science du droit civil et sur l’histoire de l’art. Dans un groupement voué aux études désintéressées, comme le Collège de France, c’est parfait : dans une université où se passent des examens, et où l’étudiant a en quelque sorte tout à apprendre, c’est un abus.

Tous ces inconvéniens, les membres les plus actifs de l’enseignement supérieur du pays les sentent très bien. De là un certain nombre de projets intéressans : mais dans chacun on remarque cette tendance commune aux-nations à l’imagination vive, aux ambitions exigeantes. Elles reculent devant les réformes patientes et méthodiques qui réclament des sacrifices