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la veille de l’être. Enfin les étudians, — et aussi leurs maîtres, — visent de plus en plus à la formation immédiate et pratique : les accroissemens mêmes de la science proprement dite les amènent à choisir dans cette encyclopédie de plus en plus compliquée, pensent-ils, l’étude spéciale qui leur paraît seule convenir à ce qu’ils croient déjà savoir de leurs propres aptitudes et de leurs ressources personnelles. Il y a quelques années, nul n’entrait dans les écoles polytechniques de Turin, Milan… sans avoir fait ses deux premières années dans une faculté des sciences. A Turin, dès aujourd’hui, — et bientôt sans doute partout ailleurs, — les études correspondant à ces carrières se feront toutes à l’école même. On juge évidemment que tout s’y adaptera mieux et surtout plus vite à la destination choisie. Mais j’ai entendu des jeunes gens intelligens et travailleurs émettre eux-mêmes à ce sujet des plaintes judicieuses : ils regrettaient de se voir tout de suite livrés sans idées générales et sans explication des méthodes les plus fécondes, à des amoncellemens de formules et à des descriptions de procédés où le raisonnement a moins à faire que la mnémotechnie.

Faut-il croire que les hommes d’aujourd’hui se préoccupent moins de leur santé que de leurs procès et qu’ils ont moins de souci d’améliorer leur organisme que leurs machines ? En tout cas, on a vu combien le nombre des étudians en médecine avait baissé, et on ne sera pas surpris de trouver une chute identique chez les étudians en sciences naturelles et chez les étudians en pharmacie. Je ne reparlerai pas de la diminution du nombre des vétérinaires, dont la formation relève aussi des universités. C’est cependant là un art qui intéresse au plus haut point l’agriculture : mais justement, le recrutement des ingénieurs agricoles est lui-même stationnaire, sinon en recul, ce qui va certainement à l’encontre des nécessités les plus pressantes comme des aptitudes les plus éprouvées des populations italiennes. Revenons donc aux médecins. Pourquoi semblent-ils se décourager ? Pourquoi cette espèce de désertion de la carrière ? Y aurait-il trop de médecins ? Il y en a trop dans les villes et pas assez dans les campagnes. Dans les unes comme dans les autres sans doute, on rappelle que certaines maladies comme la fièvre typhoïde, comme l’angine, comme la fièvre puerpérale, font moins de ravages que par le passé. Il serait aisé de répliquer que pour que ces affections s’adoucissent, encore