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Russie ? La réciprocité dans les procédés dont elles ont donné l’exemple. Et comment peut-elle être sûre de l’obtenir, sinon par l’équilibre qui ne permet à aucune nation, ou même à aucun groupe de nations, de croire assez à sa supériorité sur les autres pour être tenté de leur imposer impérieusement sa volonté ? Tel est le but de la politique d’équilibre : la France, l’Angleterre et la Russie n’en ont pas d’autre.


En présence d’événemens aussi graves que ceux de ces derniers jours, les derniers souvenirs que nous a laissés la Chambre, avant de se séparer, sont d’un intérêt qui paraîtra sans doute un peu pâle : nous ne pouvons pourtant pas les oublier tout à fait dans une chronique de quinzaine. La Chambre a-t-elle bien mérité ses vacances par son travail ? Par la quantité, oui, peut-être ; pour ce qui est de la qualité, les plus expresses réserves s’imposent. A peine élue, la Chambre nous a en effet gratifiés de l’impôt sur le revenu et il est vrai que le Sénat a mis une complaisance extrême, une complaisance voisine de la soumission, à l’aider dans cette tâche ; mais le Sénat n’a été dans cette affaire, comme dans tant d’autres, qu’une assemblée à la suite, un pouvoir subordonné ; ce n’est pas lui qui aurait fait l’impôt sur le revenu, tel du moins que nous l’avons, s’il n’y avait pas été, ou s’il ne s’y était pas cru obligé et forcé. Sur plusieurs points il a essayé de résister et a finalement cédé sur tous, ou sur presque tous : il n’y a eu d’exception que pour un point dont nous parlerons dans un moment.

Faut-il donc croire que le pays, dont la Chambre est constitutionnellement l’expression la plus récente, ait voulu l’impôt que le Parlement vient de voter et qu’il ait donné à ses élus d’hier le mandat plus ou moins impératif de l’organiser ? Rien n’est plus loin de la vérité ; nous l’avons assez souvent démontré pour n’avoir pas à y revenir. L’impôt sur le revenu, soit : on en a tant parlé au pays et depuis si longtemps, on le lui a présenté sous des formes si séduisantes dans leur confusion étudiée, qu’il a voulu en faire l’expérience ; mais, certes, il n’a pas voulu la déclaration contrôlée, et comme une déclaration qui ne le serait pas équivaudrait à une duperie, il n’a pas voulu de déclaration du tout. La déclaration n’en est pas moins le principe essentiel de la nouvelle loi et, qu’elle doive être contrôlée, c’est ce que les rapporteurs généraux des deux Chambres ont reconnu en termes explicites. M. Camille Pelletan a dit le mot vrai dans un article de journal, à savoir que si la déclaration n’est pas obligatoire, elle sera obligée. La loi promet tant d’avantages à ceux qui la feront