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Mais à vrai dire ces nombres n’ont pas une signification nette, cela résulte de la façon même dont on les a obtenus. Parmi les plaques examinées, certaines concernent des régions de la Voie lactée et contiennent de 500 à 600 étoiles par plaque. D’autres n’en contiennent que 50 à 60 (ce sont toutes des plaques à courte pose). On aurait pu s’attendre à découvrir beaucoup plus de mouvemens propres sur les plaques riches en étoiles que sur les autres : or il n’en a rien été et on en a trouvé à peu près le même nombre sur les plaques pauvres que sur les plaques riches.

Qu’est-ce à dire ? Une comparaison nous le fera comprendre : supposons qu’à la terrasse d’un café des boulevards, j’observe les Parisiens qui passent et qui marchent en général très vite, et vont, qui vers l’Opéra, qui vers la Porte Saint-Denis. Je trouverai que leur nombre et leur vitesse, dans les deux sens, sont à peu près les mêmes. Mais supposons que survienne une nombreuse caravane Cook, qui, d’un pas tranquille de promenade, va vers l’Opéra et se mêle aux passans, j’en déduis, au premier abord, que la proportion des Parisiens pressés est beaucoup plus grande dans l’autre sens. J’aurais tort, car rien n’a changé de ce qui concerne les Parisiens, seulement un élément étranger s’est superposé à une catégorie d’entre eux, sans s’y mêler. Il en est de même pour les étoiles : les étoiles à mouvemens rapides forment, d’une certaine manière, un groupe distinct des autres. Leur rapidité prouve qu’elles sont probablement près de nous et on en peut conclure que les étoiles les plus rapprochées du Soleil sont à peu près uniformément réparties dans l’espace et forment une sorte d’amas globulaire, dont il fait partie, et qui n’a rien à voir avec la structure des régions plus éloignées du ciel. Ceci est un fait important et suggère, d’un point de vue nouveau, l’idée d’un groupe particulier d’étoiles, près du centre[duquel serait le Soleil, — idée qui, comme nous l’avons vu, nous avait été déjà suggérée par le simple dénombrement des étoiles de différentes grandeurs. On voit aussi que s’il y a un amas solaire d’étoiles, il n’occupe qu’une petite partie de l’espace, et que le plus grand nombre des étoiles en est indépendant. Ceci apporte quelque tempérament à ce qu’il pourrait y avoir d’un peu trop immodestement héliocentrique, dans la constatation précédente. La modestie est en effet de mise ici, car héliocentrisme et anthropocentrisme sont à peu près synonymes, bien que Galilée ait souffert, parce qu’on croyait à son époque le contraire. Si en effet le Soleil était vraiment le centre du monde, étant donné alors que la Terre est à son encontre, le siège de cette merveille, la pensée, et que rien n’autorise à supposer