Page:Revue des Deux Mondes - 1914 - tome 22.djvu/664

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

lorsqu’il s’agit de notre langue, de trouver un auditoire tout préparé à l’entendre.

Toute une série d’autres faits, ou d’autres organisations peuvent être donnés en exemple à l’appui de cette vérité : A Alexandrie, une école primaire laïque internationale, où, d’un commun accord, le français est admis à titre de langue principale ; une université populaire où il en est de même ; une université mondaine, enfin, à l’usage des jeunes filles et où notre langue est seule à résonner ; au Caire, un cours populaire de français, ouvert il y a quelques mois dans un faubourg et qui d’emblée voit accourir plus d’amateurs qu’il n’en peut contenir ; dans les grandes villes, des conférences françaises, littéraires ou autres, où l’on réunit, aussi aisément que dans nos grandes villes de province, plusieurs centaines d’auditeurs, et où j’ai même pu, ainsi que quelques-uns de mes collègues et moi l’avons tenté à Port-Saïd, éprouver la belle constance d’un public convié régulièrement chaque semaine pendant quatre mois…

D’autres choses peut-être seraient encore à signaler. Mais en voilà assez pour donner une idée assez exacte de la place que nous tenons encore là-bas. Reste à savoir pourquoi cette place est si grande, et surtout si, malgré notre abdication politique, notre situation morale n’est pas fatalement destinée à décliner et notre langue, à reculer.


Quelles sont les raisons qui expliquent le rayonnement persistant de notre langue et de notre culture en Égypte ?

J’ai entendu assez souvent exprimer l’opinion qu’il faudrait en faire remonter le mérite à la longue et patiente action des religieux français et de leurs écoles, depuis si longtemps établis dans le pays. Évidemment : les écoles, — congréganistes et autres, — sont, à tout moment les artisans méritoires de ce succès. Depuis bien longtemps, leur effort est tendu, et nous en recueillons aujourd’hui les fruits. Sans elles, sans nos Frères qui, là-bas, ont été les premiers à fonder leurs établissemens, notre situation morale ne serait pas ce qu’elle reste.

Mais, à aller au fond des choses, il ne suffit pas, cependant, d’invoquer l’existence de ces écoles pour expliquer leur succès et la victoire du français. Bien d’autres écoles européennes