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REVUE MUSICALE


THEATRE DE L’OPERA-COMIQUE : Marouf, savetier du Caire, opéra-comique en cinq actes, d’après les Mille et une Nuits (traduction de M. le docteur Mardrus) ; poème de M. Lucien Népoty, musique de M. Henri Rabaud. — Il Barbiere di Siviglia, au THEATRE DES CHAMPS-ELYSEES. — L’Orfeò Català.


Le mois dernier, après deux auditions, il nous sembla que Marouf, savetier du Caire, était une chose délicieuse. Après une étude attentive et charmée, nous croyons en être sûr aujourd’hui. Et cette chose est d’un genre, qui, dans la musique française, pouvait paraître à jamais perdu : celui que Molière appelle quelque part « le caractère enjoué. » Marouf est de bonne humeur. Marouf est spirituel. Marouf « a le sourire. » Venant après tant d’œuvres obscures et maussades, que cette œuvre aimable et claire soit la bienvenue ! Sachons-lui gré de nous rappeler que la musique, la nôtre, est capable d’être encore, au lieu d’un « effort considérable,  » un facile et libre jeu, un plaisir, délicat sans doute et distingué, mais enfin, pour l’esprit et même pour l’oreille, un plaisir. Il était grand temps que cette leçon fût donnée à quelques-uns, et, à quelques autres, cette joie.

On aurait dû, jusqu’à Marouf, appeler M. Henri Rabaud l’auteur de la Fille de Roland. On ne l’a pas fait. C’est un tort. Cette tragédie lyrique ne reçut point, voilà juste dix ans, l’accueil dont elle était digne. Personnellement, nous fûmes alors empêché de l’entendre. Mais nous l’avons lue, relue, et nous attendions, pour en parler, une occasion qu’on ne pouvait espérer plus heureuse. La Fille de Roland est de ces œuvres qui fondent sur de solides bases la réputation d’un véritable musicien. Apprenez avant tout, ou rappelez-vous, si vous la connaissez, que la partition de la Fille de Roland « commence. » Par