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Ils croyaient également à la possibilité d’y faire pousser le blé ou la vigne de la terre natale. Nous n’ignorons plus que le blé ne fructifie pas sous les tropiques. Nous connaissons également les effets désastreux que les climats chauds produisent à la longue sur nos organismes, même indemnes de toute maladie.

On ne trouva d’abord qu’un remède à ce mal des tropiques, le rapatriement. C’est encore à peu près le seul procédé officiel que nous sachions employer dans nos colonies. Les étrangers en utilisent un autre plus économique, dont nous aurions grand tort de ne pas tirer également profit.

Le rapatriement d’un fonctionnaire impose à son administration des frais considérables de transport, de solde, de remplacement. Si c’est un colon qui doit revenir en Europe pour sa santé, le voyage, souvent coûteux pour ses ressources, risque d’entraîner sa ruine en l’éloignant de ses affaires. Il faut sauver cependant à tout prix la vie ou la santé de l’un comme de l’autre, car tous deux représentent un capital précieux, mais rien n’est plus naturel que de rechercher et de préférer le moyen le moins dispendieux de parvenir au but.

C’est pour ce motif que les Anglais et les Hollandais ont créé des sanatoria dans les montagnes de l’Inde et de Java, à des altitudes telles qu’on y retrouve une température analogue à celle des pays d’Europe. Les Européens fatigués par un séjour dans les régions basses et chaudes peuvent s’y retremper sans quitter la colonie et les maladies aiguës n’y sont que rarement traitées. Ces stations devraient donc s’appeler de préférence des « preventoria. »

Les Américains eux-mêmes, nouveaux venus dans la vie coloniale, viennent d’achever, pour leurs troupes et leurs fonctionnaires des Philippines, une station d’altitude, pourvue de casernes, de villas privées, de cercles et d’hôpitaux dont le prix total dépasse plusieurs millions. Les Allemands, moins bien pourvus par la nature, sauf au Cameroun, envoient aux Canaries leurs coloniaux de l’Ouest Africain.

Nous ne pouvons pas nous targuer d’avoir accompli des efforts comparables à ceux de ces peuples étrangers. On remarque cependant, sur les montagnes qui avoisinent nos vieux établissemens de l’océan Indien, de petites constructions aux façades blanches, visibles de très loin au milieu des verdures. Elles servaient naguère de maisons de repos pour nos fonctionnaires.