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été institués, entre des villes peu éloignées, qui précédemment n’étaient reliées qu’avec la capitale. Aussi, de Mézières à Charlemont, — trajet de 10 lieues, — une lettre mettait-elle trois semaines, parce qu’elle devait aller à Paris et en revenir.

En comparant, de 1791 à l’an IX (1801), le parcours annuel des agens des postes, en voiture, à cheval ou à pied, l’on constate que, dans l’espace de ces dix années, le chiffre des kilomètres était passé de 7 millions et demi à 15 millions. — Il est aujourd’hui de 260 millions, dont 189 millions sur voies ferrées. — Quoique les postes eussent ainsi doublé d’importance, leur produit brut avait à peine augmenté (de 33 millions à 35) et leur produit net avait baissé (de 23 millions à 16 et demi).

Les recettes étaient demeurées stationnaires : parce que le tarif des affranchissemens avait été abaissé et que le port des papiers de procédure, — le sac à procès était une partie notable du trafic postal sous la monarchie, — était moins lucratif depuis que les tribunaux avaient été rapprochés de leurs justiciables. ; Les dépenses au contraire s’étaient beaucoup accrues : l’extension du service en poste à un très grand nombre de routes n’avait pu se faire qu’à un prix quatre fois plus haut qu’en 1791, pour dédommager les maîtres de poste de la presque inactivité à laquelle ils étaient réduits, par la concurrence des voitures libres, presque aussi rapides que les malles ; quant aux buralistes, leur traitement avait grossi à proportion du travail qui leur était imposé. Quoique ce travail se fut multiplié depuis le début de la Révolution, rien n’eût pu faire prévoir en 1801, ni même en 1840, le prodigieux développement des postes qui, dans notre France contemporaine, véhiculent, classent et font annuellement parvenir à leur adresse trois milliards et demi de lettres, de cartes, journaux et papiers de toute sorte.

Si l’on suit en détail dans certaines localités la marche du progrès postal depuis cent ans, on remarque que, jusqu’au milieu du règne de Louis-Philippe, nombre de petites villes ne possédaient encore ni bureaux, ni distribution journalière. Quant aux simples communes rurales, la plupart se contentaient d’une distribution par semaine. A Peyreleau (Aveyron) où le facteur passait tous les huit jours, une délibération du Conseil municipal s’exprime ainsi en 1832 : « Le service actuel des postes suffit aux besoins ; le service journalier ne serait d’aucun avantage. » En 1843, ce chef-lieu de canton fut doté d’une