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LE PORT DES LETTRES
DEPUIS SEPT SIÈCLES[1]


I

On écrit plus que l’on ne voyage. Autant et plus que le déplacement des personnes, la circulation des lettres a modifié les conditions de la vie. La transmission régulière des correspondances fut un progrès plus grand, en son temps, que n’ont été dans le nôtre le télégraphe ou le téléphone, inventions beaucoup plus merveilleuses en elles-mêmes. Le télégraphe abrège, le téléphone supprime le délai des communications ; mais ces communications mêmes, à peu près inexistantes avant elle, la « poste » les créait, — la « poste, » dans son acception moderne, puisque ce mot eut longtemps un tout autre sens ; les anciennes postes étant exclusivement des relais de chevaux et n’ayant rien de commun avec le port des lettres, lesquelles étaient confiées à des messagers publics ou privés.

Le Moyen âge, qui avait des vassaux-bergers ou fileuses de chanvre et des cuisiniers héréditaires, eut aussi des coureurs « fieffés, » gratifiés d’une terre qu’ils possédaient féodalement en propre, moyennant l’obligation de remplir chez le seigneur, de père en fils, à perpétuité, l’emploi de coureur. Lestes et agiles, les premiers coureurs féodaux eurent sans doute dans leur descendance des hommes replets et poussifs et, d’un

  1. Voyez, dans la Revue du 1er octobre 1913, les Moyens de transport depuis sept siècles ; Routes et voyageurs à cheval ; et, dans la Revue du 15 décembre 1913, Diligences, Chaises de poste et Auberges.