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ont adopté aussi ces mêmes usages. La vie atteint son apogée quand la musique commence à jouer dans le petit temple central. C’est une vraie fête populaire : de tous côtés arrivent des ouvriers, qui s’assoient sur les bancs, tandis que la jeunesse danse ou mime les tours d’adresse des toréadors.

Le rendez-vous de la société élégante se trouve un peu plus loin, dans le nouveau quartier. La place de la Réforme est un peu à Mexico ce qu’est à Paris la place de l’Étoile. Elle forme aussi une rotonde, mais, au centre, au lieu d’un arc de triomphe s’élève la statue en pied fièrement campée du roi Charles IV, monument remarquable à tous égards. Il fut érigé au XVIIIe siècle par Tolosa. Le piédestal en bronze doré a été fait aussi dans le pays même. Cette œuvre est indubitablement la plus belle création de l’art mexicain.

Avant d’occuper sa place actuelle, cette statue eut une véritable odyssée. Sous la domination espagnole, érigée sur la place principale, elle fut confinée pendant les troubles dans la cour isolée de l’Université. Quand Humboldt eut déclaré qu’elle n’était dépassée en beauté que par celle de Marc-Aurèle au Capitole, on résolut de la faire sortir de sa prison. Alors on la plaça sur des roues et on la promena à travers la ville. Dès lors, elle reçut le surnom de « cheval de Troie. »

L’Avenida de la Reforme mène en une ligne droite de deux kilomètres jusqu’au parc de Chapultepec. Cette large avenue bordée de corbeilles fleuries et de statues est à bon droit l’orgueil du Mexicain ; elle est en vérité une Via triumphalisv Parmi les nombreux monumens, celui de l’Indépendance est le principal.

La Via San Francisco unit les différentes parties de la ville. Elle renferme les plus beaux magasins, les brillans étalages et par suite le plus grand nombre de promeneurs. À toute heure du jour, elle est animée, on y flâne, on s’y entretient à loisir.

Évidemment, les Méridionaux sont sociables. La solitude leur est insupportable, il leur faut de continuelles distractions. Le reproche fait en général au Mexicain de n’être point hospitalier n’est pas fondé. Certainement, ils ne tiennent pas maison ouverte et n’invitent pas souvent les étrangers, mais ceci a lieu moins par manque de bienveillance que par fausse honte. Ordinairement, leurs maisons sont mal installées, ils n’ont qu’un service médiocre et n’osent pas recevoir. Au lieu de faire des