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promise sera promulguée en 1916, quand les mesures préparatoires auront été prises. Pendant qu’en haut la prudence mandarinale prépare, par une gradation habile, l’avènement d’un régime constitutionnel, en bas, dans la masse du peuple, les impatiences réformatrices et révolutionnaires précipitent les événemens. Les sociétés secrètes, qui reçoivent le mot d’ordre de Sun-Yat-Sen, organisent la rébellion, travaillent à s’assurer le concours de la force armée. La révolution et la réforme se préparent ainsi parallèlement, mais la révolution est plus pressée et peut-être plus sincère.

La mort, presque simultanée, de l’empereur Kouang-Siu et de l’impératrice douairière Tseu-Shi fait passer la dignité impériale sur la tête d’un tout jeune enfant, Pou-Y, sous la régence de son père le prince Tchouen. Yuan est disgracié, relégué dans son pays natal du Ho-Nan. Le gouvernement poursuit sa politique de réformes. Le 14 octobre 1909 les assemblées provinciales se réunissent ; comme c’est la règle pour toutes les assemblées délibérantes, elles tendent à outrepasser leurs attributions, à usurper sur le pouvoir exécutif. Elles envoient des délégués au pied du trône pour demander que la convocation du parlement soit avancée de cinq ans et réalisée en 1911. Les délégués provoquent des manifestations, organisent toute une agitation pour soutenir leur vœu ; la Cour tient bon, maintient la date de 1916, mais, pour se conformer aux engagemens du précédent règne, elle convoque l’assemblée nationale consultative : c’est celle que la presse européenne a appelée le Sénat ; elle se réunit le 3 octobre 1910 et, tout de suite, elle manifeste sa volonté d’accroître son importance et de dépasser son mandat ; d’accord avec les délégués des provinces, restés à Pékin, elle organise une campagne de pétitions et de manifestations pour hâter la date de la convocation de l’assemblée nationale ; l’ordre est troublé dans la rue ; une bombe éclate dans la maison du Régent. C’est le scénario traditionnel de toutes les révolutions : le gouvernement cède, accorde la convocation du parlement pour 1913 (décret du 4 novembre 1910) et, naturellement, l’impatience des réformateurs redouble, les pétitions se multiplient, les troubles s’aggravent. Le gouvernement prononce la clôture de l’assemblée (10 janvier 1911). Dans les provinces, l’effervescence est de plus en plus générale ; des bandes armées parcourent le pays. Brusquement, le 10 octobre 1911, la