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et qui n’en ignorent pas les règles ; il faut enfin des livres, des grammaires et des vocabulaires.

Pour avoir l’intelligence des textes, qui fut donnée par Dieu à leurs auteurs, il faut recevoir et donner l’enseignement. Or le maître idéal doit savoir les sciences dont il veut transmettre la connaissance, les langues dans lesquelles elles sont exposées, et celle dans laquelle il les expose. Il doit ainsi se rapprocher du maître suprême, de Dieu qui a enseigné, à ceux qui l’ont possédée d’abord, la sagesse divine et humaine. Jugés de ce point de vue, la plupart des maîtres ne pouvaient donner à Roger Bacon une satisfaction complète : seul Pierre de Maricourt, qui continue d’ailleurs ses recherches et semble en instituer incessamment de nouvelles, n’est l’objet d’aucune de ces restrictions auxquelles n’échappe pas même Robert de Lincoln. D’autant plus que Roger Bacon se montre fort difficile sur la méthode à suivre dans l’enseignement public et dans l’enseignement privé. C’est surtout par la façon dont on explique, dont on expose, dont on répond aux questions, par la clarté et la netteté du manuel ou du résumé, par la puissance de la parole, qu’un maître habile arrive rapidement à enseigner ce qu’il sait à un élève diligent et attentif. Et il y a des règles pour le travail personnel de l’élève comme pour celui du maître : il faut qu’il écarte, par lui-même, toutes les causes d’erreur, qu’il évite le péché et poursuive la pureté morale, qu’il obtienne ainsi la grâce divine, qu’il soit studieux, qu’il apporte la plus grande attention et la plus grande docilité aux leçons qu’il reçoit, qu’il interroge le maître quand il ne l’a pas compris, avant qu’il essaie lui-même, en enseignant aux autres, de savoir comment il s’est rendu compte des choses ; il faut enfin qu’il s’exerce à développer les principes qu’il a puisés dans les leçons orales et écrites par des applications multiples et diverses.

En dernier lieu, il convient de faire appel à l’expérience et à l’observation pour vérifier la valeur des assertions émises par les maîtres du passé et par ceux du présent, comme pour augmenter les connaissances déjà acquises, — à l’expérience externe par les sens et les instrumens, comme à l’expérience par illumination intérieure.

Or Roger Bacon a toujours, même étant chez les Franciscains, recherché les livres. Les langues, il les a étudiées pendant toute sa vie ; il a laissé un fragment de grammaire hébraïque