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éloquente à ceux qui parlent chez nous de supprimer le service de trois ans et de revenir au service de deux.

C’est toutefois une grande plaie pour le monde que ces armemens qui vont sans cesse en augmentant, et on se demande avec anxiété où s’arrêtera leur course folle. L’Allemagne parait vouloir aller jusqu’à l’épuisement de ses ressources : tout le monde sera-t-il obligé de l’imiter ? Ces efforts, si nombreux, si coûteux, sont faits, nous le voulons bien, en vue de la paix ; mais si, finalement, la paix est plus onéreuse que la guerre, qu’adviendra-t-il de l’Europe lorsqu’elle aura, en effet, épuisé ses ressources en hommes et en argent, et que toutes les nations se trouveront en face les unes des autres avec le maximum de force militaire dont elles sont susceptibles ? La question s’impose de plus en plus aux esprits et n’est pas de nature à les rassurer.


Nous avons annoncé, il y a quinze jours, l’initiative si opportune prise par les États de l’Amérique du Sud, l’Argentine, le Brésil et le Chili, qui ont offert leur médiation entre les États-Unis et le Mexique, après le bombardement et l’occupation de Vera-Cruz. Le canon américain avait retenti dans le monde entier comme une sorte de tocsin. Sans contester la légitimité des griefs du président Wilson contre le général Huerta, on se demandait quelles seraient la suite et la fin d’une entreprise qui se présentait un peu comme une aventure et dont il était impossible de prévoir tous les développemens. Ceux qui cherchent des motifs cachés aux actes les plus publics se demandaient quel intérêt avaient les États-Unis à une guerre contre le Mexique, et ce sont là des questions auxquelles on trouve toujours des réponses ; mais le caractère connu du président Wilson ne permet pas de croire chez lui aux arrière-pensées qu’on prêtait à son gouvernement, et nous sommes convaincus que, du point de vue moral où il se place, son seul but est de se débarrasser du général Huerta qu’il considère comme l’incarnation de la fraude et même du crime. Qu’à côté de lui, d’autres aient des pensées différentes et que, au fur et à mesure que les événemens évolueront, de nouveaux objets s’imposent par la force des choses à la politique de Washington, rien assurément n’est plus probable ; mais à l’heure où nous sommes, il ne s’agit pour M. Wilson que de venir à bout de M. Huerta et de faire rentrer le Mexique dans les voies normales du gouvernement constitutionnel. Malheureusement, il n’est pas facile de venir à bout de M. Huerta, et il l’est peut-être encore moins, beaucoup moins, de faire fleurir la