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17 janvier 1906, en restreignant à quatre ans la validité d’un brevet qui n’aurait pas été exploité d’une manière effective, a contribué au développement de l’industrie nationale. Celle-ci est également protégée par le tarif qui est en vigueur depuis le 1er mars 1906.

La Roumanie, on le voit, est encore à la période heureuse où l’industrie agricole est prédominante. C’est sa production en céréales qui constitue le fonds de sa richesse : à elles seules elles représentent les onze douzièmes de ses exportations. La quantité et la valeur des récoltes annuelles ont progressé rapidement ; on estime le revenu du pays à 3 milliards de francs, c’est-à-dire au triple de ce qu’il était il y a vingt-cinq ans.


IV

Tels sont les élémens économiques de la vie roumaine. Mais les chiffres ne suffisent pas à en donner une idée complète. Il est nécessaire, pour la comprendre, de savoir quelles sont les idées qui animent ce peuple et de connaître l’ardent patriotisme dont les témoignages ont été si éclatans et si nombreux lors des événemens de 1913. L’économiste doit ici faire une incursion sur le terrain politique. Pendant longtemps, nous avons considéré que la Roumanie était inféodée à la Triple-Alliance, et nous nous refusions à croire qu’une nation sur laquelle règne un prince de la maison de Hohenzollern pût avoir pour la nôtre d’autres sentimens que ceux d’une sympathie platonique. Nous oubliions d’autre part la situation très délicate dans laquelle se trouvaient les Roumains, depuis 1878, vis-à-vis de la Russie, qui leur avait pris la Bessarabie sans égard pour le concours décisif que leur armée lui avait donné dans la guerre contre les Turcs. Placés entre les deux grands empires moscovite et autrichien, les hommes d’Etat de Bucarest avaient une tâche particulièrement délicate à remplir. La guerre de 1912-13 leur a permis de s’orienter avec plus de netteté. D’une part, le rapprochement avec Pétersbourg s’est accentué. Le Tsar n’a pas toujours eu lieu d’être satisfait de l’attitude de ses cliens balkaniques : il a plus d’une fois dû élever la voix pour se faire écouter à Sofia, et il a pu redouter, lors de l’agression contre les Serbes, de voir s’établir au profit de la Bulgarie une hégémonie écrasante pour les Slaves du Sud-Est. Il a reconnu que