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ÉTUDES
SUR
LA ROCHEFOUCAULD

Consciencieusement, laborieusement et avec beaucoup de tact et de goût, M. Georges Grappe a réuni et commenté dans la Bibliothèque française les principaux textes du duc de La Rochefoucauld.

Consciencieusement, diligemment et avec beaucoup de pénétration psychologique et beaucoup d’esprit, M. Grandsaignes d’Hauterive a consacré un très agréable volume au Pessimisme de La Rochefoucauld. Sans aller plus loin, ce titre m’étonne. Je ne vois, à proprement parler, aucun pessimisme dans le petit livre de La Rochefoucauld. Expliquons-nous tout d’abord sur ce point-ci.

Il y a trois degrés. Il y a la mélancolie, il y a la misanthropie, il y a le pessimisme. La mélancolie, — qui tient beaucoup du tempérament, comme toutes les passions du reste, et c’est un point sur lequel Descartes, La Rochefoucauld et bien d’autres sont parfaitement d’accord et M. d’Hauterive le fait justement remarquer, — la mélancolie est une sensation habituelle de mal-être et d’inadaptation au milieu où l’on se trouve placé. Elle est une sensation de constant déboire. Elle n’accuse précisément personne, mais elle se plaint vaguement de tout. Elle est un mécontentement presque abstrait. Renan disait : « Je ne sais pas précisément qui je remercie ; mais je remercie. »