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évêques députés à l’Assemblée déclareront : « Nous avons ignoré les brefs de Sa Sainteté, celui qu’Elle avait adressé au Roi comme ceux qu’ont reçus les archevêques de Vienne et de Bordeaux. » Ces derniers, en présence du fait accompli, considérèrent sans doute comme inutile de faire connaître la protestation pontificale puisqu’elle était arrivée après l’engagement du Roi de promulguer la Constitution civile. On peut les excuser, d’autant plus que les brefs avaient forme de documens secrets, mais en tout cas, on ne peut dire que le Pape avait laissé ignorer son sentiment à qui de droit. Il avait parlé, et parlé dès le premier jour.

Sa seconde manifestation officielle est du 17 août. C’est la réponse aux propositions faites pour « baptiser » la Constitution civile ; ne fût-ce qu’à titre provisoire. Le Pape annonce qu’il va réunir une assemblée de cardinaux, chefs d’ordres, préfets de congrégations pour examiner les demandes du Roi, et rappelle sa première protestation : « Si nous n’avons pas prêché sur les toits, nous n’avons pas non plus dissimulé la vérité. » Il résulte de sa lettre qu’il ne veut rien brusquer, qu’il ne tient pas à crier « sur les toits » sa réprobation, mais qu’il la confirme. Un tel langage n’a rien d’hésitant ni d’équivoque, ni d’autre part rien de cassant ni d’agressif. Quand cette lettre du Pape parvint à Paris (vers le 30 août), la Constitution civile était promulguée depuis le 24. On ne peut vraiment dire que son contenu ait influencé Louis XVI et ses ministres.

La Congrégation, chargée d’examiner les propositions faites par le Roi pour ménager ce que le nonce appelait « un expédient par intérim, » conclut le 24 septembre à une demi-mesure. Le Pape « écrirait au Roi un bref paternel dans lequel il exposerait succinctement la doctrine de l’Eglise sur les questions dont il s’agit aujourd’hui et un autre bref aux évêques pour les affermir dans les bons principes, en les exhortant à lui fournir les moyens de tranquilliser les consciences sans susciter de nouveaux troubles. »

C’est à cette solution que se rallia le Pape, solution qui ne tranchait rien, mais aussi ne compromettait rien. Bernis allait peut-être un peu loin en « bénissant le Ciel d’avoir donné à l’Église un chef aussi sage qui cherchera toujours de bonne foi le repos, la paix de la France, » il n’en était pas moins vrai que si le Pape avait eu le parti pris de rompre, il n’aurait pas