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mauvais curés par les évêques, ce que la Constitution civile n’empêchait pas ; de même, arrangemens à négocier avec le Pape au sujet de l’institution canonique ; lui seul a le droit de la donner, mais il peut le communiquer à d’autres. Il y a donc des formes à respecter, des combinaisons à imaginer pour sauver garder les rites traditionnels. C’est une affaire de bonne volonté générale : ainsi les évêques dont les diocèses se trouvent supprimés se démettraient spontanément, — comme ils le feront du reste au moment du Concordat. Ni le ton ni le fond dans toutes les restrictions exprimées n’ont rien d’une provocation. L’évêque de Clermont, au moment de renouveler le serment civique, déjà prêté le 4 février et qui devait être renouvelé pour la fête de la Fédération (14 juillet 1790), dit simplement au nom de ses confrères députés : « J’excepterai de mon serment tout ce qui regarde les choses spirituelles. » Nul ne s’en étonna ni ne s’en choqua. A droite comme à gauche, on vit là une formalité réservant l’avenir, un avenir prochain qui devait tout arranger.

Les deux archevêques de Vienne et de Bordeaux, qui faisaient partie du Conseil, préparèrent un mémoire pour amener le Pape à une transaction. Le ministre des Affaires étrangères, Montmorin, en le transmettant à Bernis, notre ambassadeur près du Saint-Siège, indique que ces deux prélats « se sont eux-mêmes aidés des lumières d’autres évêques de l’Assemblée. » Le nonce écrit de son côté que les archevêques d’Aix et de Toulouse ont insisté auprès de lui pour que le Saint-Père acceptât les propositions conciliantes du Roi, à titre « provisoire, » et Boisgelin, l’archevêque d’Aix, écrivit au Pape dans le même sens. L’évêque de Clermont, Bonal, « un des plus respectables membres du clergé, » dit le nonce, déclare à, ce dernier « que les évêques présens à l’Assemblée et la plus grande partie de ceux qui sont dans leurs diocèses désirent vivement que Sa Sainteté seconde, de la manière qu’elle jugera le plus convenable, les sages et religieuses demandes de Sa Majesté. » En négociant avec Pie VI l’acceptation de la Constitution civile, Louis XVI répondait donc au vœu de la partie la plus nombreuse et la plus marquante de l’épiscopat.

Malheureusement les événemens vont se précipiter. La Constitution civile, votée le 12 juillet, est sanctionnée par le Roi le 24 août sans qu’aucune réponse du Pape ait été reçue,