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rangée en ligne, avec son drapeau et son tambour, qui battait vigoureusement sans discontinuer. Cette garde était peu nombreuse et surtout peu brillante. Ceux qui la composaient avaient piètre mine, ainsi que la populace en haillons qui criait : « Vive le Roi ! vive la Reine ! vivent les princes et leur société ! » Comme il fallait passer ces gens en revue, les princes s’apprêtèrent à descendre de voiture sur le gazon horriblement mouillé. Je leur déclarai que je ne descendrais certainement pas avant d’avoir vu de mes yeux le Roi mettre pied à terre.

— Voilà qu’on ouvre la portière de la voiture du Roi, nous dit le Duc d’Aumale, descendons.

Un des aides de camp, M. Dumas, qui était avec nous, sauta à bas du char à bancs et courut vers la voiture de Sa Majesté, mais il revint aussitôt, nous apportant l’agréable nouvelle que le Roi n’avait pas quitté le marchepied et s’y était tenu pour dire quelques mots à la garde nationale. Presque en même temps, les voitures se remirent en marche et, en quelques minutes, nous arrivions au château où nous descendîmes. On se réunit au salon, puis nous allâmes nous promener dans les serres. Là, on offrit des bouquets aux dames, et Mgr de Montpensier remplit ses poches d’oranges.

Les voitures nous attendaient de l’autre côté de la rivière qui traverse le parc et nous passâmes le pont à pied, parce qu’il n’est plus assez solide pour supporter le train de tant d’équipages peu légers. De l’autre côté du pont, nous attendaient trois chars à bancs dorés, attelés de six chevaux. Il y avait en outre des chevaux de selle pour ceux qui en voulaient. Nous fîmes une petite tournée dans le parc, et l’on s’arrêta à la vacherie, où les princes offrirent aux dames du lait chaud et du pain de ménage. Puis on se remit en route pour faire la grande tournée des bois.

Dans les villages que nous traversâmes, nous fûmes reçus avec des acclamations de « Vive le Roi ! vive la Reine I » Dans une des allées de la forêt, un arc de triomphe en verdure et en fleurs était dressé, entouré de la garde locale. .Le cortège ne s’y arrêta pas. Un peu plus loin, sous trois très belles tentes réunies, le dîner était servi parmi les arbres et les fleurs. J’ai donné le bras à la princesse Schönburg et je me suis trouvé assis entre elle et sa sœur Brezenheim.

Après dîner, on rentra au salon, où il y eut une nouvelle