Page:Revue des Deux Mondes - 1914 - tome 20.djvu/818

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


Le 13 octobre 1909, Edouard VII tenta, mais en vain, d’éviter, par son intervention, le premier conflit que le budget socialiste de D. Lloyd George allait provoquer entre les Communes et les Pairs. Victoria avait été plus heureuse en 1869 et en 1884. George V, dans la mesure où le lui permirent les circonstances, essaya, lui aussi, d’enrayer par son arbitrage ces différends entre les deux Chambres, dont s’inquiète avec raison la monarchie britannique, comme d’une menace pour les privilèges aristocratiques et comme d’un péril pour la stabilité constitutionnelle.

Le 7 mai 1910, guidé dans ses débuts par lord Rosebery, il profite de l’émoi qu’éveillent dans l’Angleterre loyaliste la disparition subite du diplomate génial et l’avènement prématuré du marin inconnu, pour arracher à la majorité radicale et à l’opposition conservatrice un armistice. Une conférence parait être le moyen de résoudre, logiquement et pacifiquement, par un débat contradictoire, par des concessions réciproques et une révision constitutionnelle, les conflits périodiques qui mettent aux prises Lords et Communes, dès que les radicaux sont au pouvoir. Les leaders se réunissent et délibèrent. Ils examinent divers types de tampons et divers organes de liquidation. Ils étudient le différend de demain, — le Home Rule, — et recherchent le moyen de l’éviter. Le 10 novembre 1910, la Conférence se sépare, et la Chambre est dissoute. Les élections générales ont lieu et le parti radical garde le pouvoir. Le Parliament Bill devient définitif et le veto aristocratique est rogné. La poussée démocratique est victorieuse et la bataille irlandaise est engagée.

L’arbitrage royal avait échoué. Pouvait-il être renouvelé après un échec, dont le Souverain ne saurait être rendu responsable ?

Les têtes ardentes du parti conservateur le pensent. Et au fur à mesure que se rapproche la session de 1914-1915, au cours de laquelle la guillotine du Parliament Act assurera automatiquement la réalisation du Home Rule, un peu partout, dans les meetings et dans la presse, dans des discours et dans des lettres, parlementaires et juristes tories recherchent si George V ne manquerait pas à son devoir en accordant au projet de loi