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Il est question notamment de fonder l’enseignement primaire et post-scolaire de l’agriculture dans toutes les écoles de village. « L’enseignement ne sera pas exclusivement professionnel, lisons-nous dans l’exposé des motifs ; l’instituteur, en effet, ne peut avoir la prétention d’enseigner aux élèves la pratique manuelle des opérations culturales que les agriculteurs pères de famille peuvent enseigner eux-mêmes. Il leur donnera simplement des notions de sciences physiques et naturelles appliquées à l’agriculture sous forme de leçons de choses ; il leur fera connaître les plantes et les insectes utiles ou nuisibles ; il leur expliquera le « pourquoi » et le « comment » de toutes les opérations agricoles ; il leur dira ce que sont les engrais, comment on les achète, comment on sélectionne les bonnes semences, comment on doit nourrir le bétail et l’améliorer... »

C’est après leur treizième année, de 13 à 18 ans, que les élèves des écoles communales recevraient cette instruction complémentaire pendant l’hiver.

L’intention est certes très louable. Répandre l’instruction agricole, c’est contribuer partout au développement de la production et de la richesse. L’enseignement post-scolaire donné à des hommes assez âgés pour réfléchir et observer ne pourrait manquer d’être utile, si les élèves que l’on veut instruire étaient assidus et attentifs. L’expérience seule nous fera connaître le mérite réel, et surtout l’efficacité de cet enseignement nouveau. On peut cependant prévoir les difficultés spéciales que présentera le développement du programme tracé par le projet. La plus délicate et sans doute la plus grande se rapporte à la compétence du maître. Le « pourquoi » et le « comment » de toutes les opérations agricoles supposent la connaissance de bien des sciences dont l’élève n’a pas la moindre idée et que l’instituteur lui-même n’a pas étudiées assez longtemps pour les approfondir. Rien n’est plus difficile que de se mettre à la portée d’un jeune auditoire, d’être clair sans rester superficiel, et de choisir avec tact, parmi les faits scientifiques, ceux dont l’application pratique doit frapper l’esprit ou fixer l’attention d’un enfant de treize ans !

En supposant même que l’instituteur ait travaillé vaillamment pour obtenir le brevet agricole spécial visé par le projet, sera-t-il capable de donner ces leçons de choses, de fournir toutes ces explications, d’éclairer toutes ces questions qui se