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Les amoureux cachent les personnages dont ils parlent sous les pseudonymes suivans :

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L’Aventurière Aurore de Konigsmarck.
Le Réformeur Le mari de Sophie-Dorothée.
Don Diego L’Électeur.
La Romaine L’Électrice.
Le Grondeur Le père de Sophie-Dorothée.
Le Pédagogue Sa mère.
La Perspective La comtesse Platen.
La Boule L’électrice de Brandebourg.
Le Bonhomme Le maréchal Podevils.
La Gouvernante, La Confidente, La Sentinelle Mlle von Knesebeck.
Léonisse, Le Cœur gauche, La petite Louche Sophie-Dorothée.
Le Chevalier Konigsmarck.


L’ordre chronologique des lettres, rarement datées, n’a pas été facile à établir ; le contexte, seul, le plus souvent, a permis de les classer. L’ensemble de la correspondance déposée à l’Université de Lund dépasse deux cents lettres parmi lesquelles nous avons dû, non sans un véritable regret, — tant elles nous semblaient toutes intéressantes et belles, — faire un choix.


I

Née, par le hasard des luttes religieuses, sur la terre d’Allemagne, Sophie-Dorothée de Brunswick, princesse électorale de Hanovre, semble n’avoir eu d’autre religion que celle de l’amour, d’autre patrie que celle où son amour pouvait s’épanouir librement. Française par sa mère, Eléonore d’Olbreuse, la belle protestante poitevine ; Allemande par son père, Georges-Guillaume de Brunswick, duc de Zell, Sophie-Dorothée, qui fut l’aïeule du grand Frédéric de Prusse et la mère du roi d’Angleterre George II, tient à presque toutes les dynasties de l’Europe sans qu’aucune la puisse revendiquer.

Mêlée, par son étrange destinée, aux discussions, aux intrigues, aux compétitions des princes de cette maison de Brunswick, c’est elle, l’étrangère, indifférente à leurs manèges, qui deviendra la victime. Honnie, répudiée, reléguée, elle n’appartiendra plus qu’à une race : celle des grandes amoureuses.