Page:Revue des Deux Mondes - 1914 - tome 20.djvu/592

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


Pourquoi faut-il qu’à côté de pages si vraies, M. Valin paraisse ensuite s’appliquer à réédifier ce qu’il vient de démolir avec tant d’autorité ?... Comment peut-il se mettre, en quelque sorte, en contradiction avec lui-même en nous disant : « Mais de ce que la preuve du crime commis par l’évêque de Beauvais est faite, il n’en résulte pas que la Pucelle n’a pas abjuré ? » Telle est cependant la thèse de M. Valin. Il nous faut maintenant la comparer aux trois opinions dont le rapporteur nous a donné l’analyse :

Celle de M. Jules Quicherat, qui soutient que l’abjuration de Jeanne d’Arc fut totale et sincère ; car, tout en envisageant d’autres hypothèses, il dit qu’il eût fallu trop de complices et une trop grande audace pour que Cauchon pût commettre le crime d’une substitution de pièce.

La seconde opinion est celle de M. le Chanoine Dunand, qui, avec une grande force de dialectique, comme nous le dit M. le Rapporteur, a réfuté dans ses Études Critiques toute la thèse de Quicherat. M. le chanoine Dunand démontre qu’il n’y a jamais eu qu’un semblant d’abjuration et nullement une stricte et véritable abjuration en cause de foi. En ce qui concerne la fausseté de la cédule insérée au Procès, M. le chanoine Dunand, après M. l’abbé Ulysse Chevalier, apporte une démonstration qui ne saurait laisser place à aucun doute, affirme le rapport.

Au sujet de la troisième opinion, M. Valin nous dit : « Il appartenait à M. le comte de Maleissye de renouveler complètement le terrain du débat en affirmant dans ses « Lettres de Jeanne d’Arc et de la Prétendue abjuration de Saint-Ouen » que, le 24 mai 1431, Jeanne, sommée d’abjurer, avait refusé de le faire. »

Il faut, au contraire, remarquer que cette thèse avait déjà été envisagée par M. G. Hanotaux, pour lequel, dans la vie de Jeanne, dans sa personnalité morale, dans son attitude et dans ses réponses, tout contredisait qu’elle eût pu abjurer ; aussi cet éminent historien ne craignait-il pas d’écrire : « Jeanne n’a jamais abjuré, telle est la vérité. »

Mais antérieurement, dès 1891, le Révérend Francis