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puissans canons actuellement en usinage dans les fonderies de l’Europe.

Or, tandis que le gros calibre des nouveaux croiseurs de combat allemands s’élevait ainsi d’un échelon, tout en restant inférieur à celui des unités correspondantes de certaines marines, la puissance motrice suivait, elle aussi, sa marche ascendante. Le Lützow dépassera certainement les 102 000 chevaux que donna le Seydlitz dans son essai à outrance et, en dépit de l’augmentation du déplacement, il gardera, sans nul doute, les 31 nœuds de son devancier.


Des traits essentiels que nous venons de noter il ressort bien que si l’on a convenablement doté, — sans plus, — les nouveaux croiseurs de combat allemands au point de vue de l’armement, en prévision de leur participation éventuelle aux rencontres tactiques, aux batailles en ligne qui se livreront dans la mer du Nord, on leur a donné, en revanche, de remarquables facultés stratégiques pour leur faire jouer, d’une part, le rôle de grands éclaireurs du large, au cas où la flotte impériale serait conduite à opérer en dehors de ses mers territoriales, de l’autre celui d’instrumens de ce que l’on appelle communément la guerre commerciale, locution fort impropre et insuffisante, que les savans marins d’aujourd’hui remplacent volontiers par celle d’ « opérations sur les lignes de communications ; » et celle-ci, à la vérité, si elle est incontestablement juste, ne laisse pas d’avoir besoin d’un commentaire, que nous lui donnerons tout à l’heure.

Ajoutons, en attendant, que les gigantesques croiseurs de combat seraient parfaitement appropriés au rôle de convoyeurs des tout récens paquebots rapides [1], encore plus énormes, au moyen desquels on jetterait en peu d’heures sur la côte ennemie un corps expéditionnaire d’effectif moyen, destiné, soit à exécuter

  1. Ces paquebots géans appartiennent aux deux puissantes compagnies « Hamburg-Amerika Linie » (de Hambourg) et « Norddeutscher Lloyd » (de Brème). Nous en donnerons les noms un peu plus loin. Il faut seulement faire observer ici que ces deux compagnies ne se bornent plus à construire des paquebots de luxe pour voyageurs de 1re et 2e classe ; elles viennent de mettre en service et continuent à mettre en chantiers d’immenses cargo boats relativement rapides (19 n, 20 et 21 n.), qui seraient encore plus utiles, — ayant de très grandes cales et des moyens de manutention très perfectionnés, — que les paquebots, pour l’embarquement et le débarquement rapides des troupes, des chevaux, du matériel.