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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




La quinzaine qui vient de s’écouler appartient tout entière à M. Caillaux : il l’a remplie par les évolutions les plus étranges et les plus imprévues. Pendant ce temps, les autres ministres mènent une vie obscure et tranquille ; on ne pense pas à eux, on ne se demande pas ce qu’ils font, on oublie presque leurs noms, la célébrité de leur collègue des Finances les éclipse complètement. Cela ne veut pas dire que cette célébrité de M. Caillaux soit enviable. Il a trouvé le moyen d’ajouter beaucoup, en quelques semaines, à la déconsidération où le gouvernement parlementaire était déjà tombé chez nous. Mais il dure, et le Cabinet dont il fait partie continue de durer avec lui. C’est à la proximité des élections que le gouvernement doit son salut. A quelque degré de bassesse qu’elle soit tombée, la Chambre se révolterait si elle avait seulement quelques mois devant elle, mais elle a quelques semaines à peine, et cette considération la paralyse. Les élections ont été fixées au 26 avril ; la campagne électorale commencera donc avec les premiers jours du mois. Le temps est passé de chercher et de trouver des combinaisons parlementaires nouvelles. Advienne que pourra ; le sort en est jeté.

On a pu le voir au dernier vote important que la Chambre a eu à émettre à la suite d’une interpellation sur la politique financière du Cabinet. Rien n’était plus inopportun que cette interpellation. Le gouvernement venait d’être battu au Sénat : la prudence la plus élémentaire conseillait à l’opposition de vivre sur ce succès pendant quelque temps. Au lieu de cela, une grande bataille a été annoncée et s’est effectivement engagée au Palais-Bourbon. Dans ce milieu très différent de celui du Luxembourg et profondément travaillé par les sentimens divers, appréhensions et espérances, que les élections font naître, le dénouement qui s’est produit était fatal. Le gouvernement a