Page:Revue des Deux Mondes - 1914 - tome 20.djvu/456

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Enfin, de l’humble feu d’artifice, voici le bouquet merveilleux. Ruisselante de pierreries, la duchesse descend les marches du perron et s’approche de Daisy. Tendrement, elle lui propose, elle lui promet le bal, et la danse, et l’amour.


Connais-tu mon neveu ? C’est un ardent jeune homme,
Qui revient sur la mer. Le nom dont il se nomme
Est doux comme une fleur et fort comme un soutien.


(Il s’appelle tout simplement Greham.) Daisy, « entraînée par la duchesse, se dirige vers la grande porte, derrière laquelle il y a tant de lumière, de musique et de bonheur... Des voix heureuses, sortant par bouffées de l’hôtel, attirent Daisy comme des écharpes qui seraient des souffles... Daisy doit avoir bien froid ; mais elle sourit avec extase, car son âme, emportée par le rêve, est ailleurs, dans la maison et dans l’amour ; et ce n’est plus que son misérable corps qui est resté là, parmi la glaciale réalité... » Entre celle-ci et la fiction vous voyez le partage. Surtout, par les citations du texte et des commentaires, vous voyez le style. Il est on ne peut plus poétique, mais ne pèche point assurément par l’excès de la naïveté.

Le second acte, c’est le palais en fête, c’est Daisy se mêlant, timide et gauche, aux petites misses, terriblement excitées par la garniture et l’allumage de l’arbre, mais plus encore par l’approche du midship attendu. Elles accueillent gaiement leur nouvelle compagne. On rit, on chante et, comme il est naturel entre jeunes filles, on parle de l’amour. Elles en donnent, les petites folles, quelques définitions mondaines ou sportives :


Avant tout qu’il soit beau ! Avant tout qu’il soit chic !
L’amour, c’est le veston, c’est la fleur, c’est le stick.
C’est le dernier club où l’on cause.
C’est la façon de dire au téléphone : Allo !
C’est le cheval, c’est le tennis, c’est le polo.


A quoi Daisy, plus simplement, répond :


Je croyais que l’amour c’était tout autre chose.


Et cela montre assez qu’elle rêve.

Il parait enfin, le beau neveu. En uniforme couleur d’azur, son bateau le dépose au pied de la terrasse. Daisy, dont l’émoi redouble à sa vue, s’est cachée sous les basses branches du sapin de Noël. Les autres girls, plus dégourdies, l’accablent au contraire de questions et de caresses. Mais elles perdent leurs peines, ou leurs grâces, avec ce