Page:Revue des Deux Mondes - 1914 - tome 20.djvu/414

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

quelques corps de réserve. Au début du VIe siècle, ces corps étaient au nombre de cinq, forts chacun de cent à deux cents hommes. Le duc de Libye commandait en chef et concentrait entre ses mains la défense de toute la Cyrénaïque.

Quelque complet que fût le système de défense tripolitain, quelque bien coordonnés qu’en parussent être les élémens, le but visé n’a jamais été complètement atteint. Aux me et IVe siècles, en dépit des précautions prises et des progrès de la romanisation, Rome eut souvent encore à combattre pour assurer la paix. Septime Sévère détruisit quelques bandes barbares qui terrorisaient la région et rendit la sécurité aux villes maritimes.

Un autre épisode, qui nous est raconté en détail par Ammien Marcellin, jette un jour singulier sur l’état de la province au IVe siècle. Il s’agit de l’invasion des Austuriens en 364-366. Les Austuriens étaient une peuplade indigène, établie dans la région des Djebels, au Sud de Leptis et d’Oea. C’étaient des pillards incorrigibles, « ne vivant que de rapines et de meurtres, redoutables par la rapidité de leurs dévastations, » et qui apportaient dans leurs déprédations « une furie de bêtes féroces. » En 364, ils dévastent pendant trois jours les environs de Leptis, surprennent dans la campagne un des principaux magistrats de la ville, Silva, avec sa famille, et retournent chez eux chargés de butin.

En 365, en 366, les Austuriens reviennent à la charge « comme des oiseaux de proie qui ont senti le carnage, » coupent les arbres et les vignes, tuent tous les habitans qui n’ont pu fuir assez vite ou trouver un refuge dans les cavernes, et poussent même l’audace jusqu’à assiéger Leptis. Le siège dure huit jours, mais la ville se défend énergiquement, et les barbares sont contraints de se retirer. L’alerte, sans doute, avait été momentanée. Tout au moins suffit-elle à prouver que la pacification de la Tripolitaine a toujours été superficielle et que, même sur la côte, après quatre siècles et demi d’occupation, les pires surprises restaient possibles.


III. — L’EXPLOITATION ÉCONOMIQUE

L’exploitation agricole des pays africains a toujours été étroitement liée à la présence de l’eau. Nulle part cette vérité générale