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plaies ; avec l’huile, sur les piqûres des scorpions, avec la farine d’orge et les figues sèches, sur les ulcères ; avec le miel ou la glu, sur les morsures de chiens... On s’en sert avec un mélange de nitre, pour le traitement des clous. Employé avec du vin, du safran ou. du poivre, il fait repousser les cheveux ; avec du vin ou de l’huile, il guérit les engelures. C’est un utile préservatif contre les eaux malsaines, les contrées ou les températures insalubres. On le prescrit dans la toux, dans les affections de la luette, dans l’hydropisie, dans l’enrouement. Dissous dans l’oxycrat, il adoucit les douleurs de goutte. Aux pleurétiques, on le fait prendre dans une décoction d’orge. Dans les convulsions, on en donne une pilule grosse comme un pois et enduite de cire ; dans l’angine, on le prescrit en gargarisme ; avec du vin, dans l’épilepsie, avec de l’eau miellée, dans la paralysie de la langue. On en fait avec le miel bouilli un topique pour la coxalgie et les maux de reins. » Quelquefois, il est vrai, les résultats, pour être immédiats, sont moins heureux. Pline raconte l’histoire d’un homme, qui eut la malencontreuse idée de s’en servir contre le mal de dents et, fou de douleur, se précipita la tête la première sur le sol. Mais c’est là une mésaventure exceptionnelle à laquelle il n’attache pas d’autre importance.

Il n’y avait rien d’étonnant, dans ces conditions, à ce que cette plante de choix valût son pesant d’argent. Elle avait sa place dans le trésor de l’État à côté des métaux précieux et des pierres de prix. Auguste, entre autres termes d’affection, appelait son ami Mécène : « Mon cher silphium d’Arezzo. » Malheureusement, ce silphium incomparable, source presque infinie de richesses pour la Cyrénaïque ancienne, a entièrement disparu, et si complètement, que les botanistes modernes en sont encore à discuter sur sa véritable identité.

Les richesses agricoles de la Cyrénaïque étaient donc multiples. Autre caractéristique non moins importante : grâce à l’étagement des cultures, les récoltes étaient successives : « Le territoire de Cyrène, dit Hérodote, se divise en trois régions distinctes. Dans celle des bords de la mer, les fruits mûrissent les premiers, et la moisson, ainsi que la vendange, s’y font de très bonne heure. Quand elles y sont terminées, les fruits commencent à mûrir dans la région intermédiaire qui s’élève à partir des bords de la mer et qu’on appelle en général la colline.