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avec son chiffre surmonté d’une couronne de lauriers[1]. Mme Washington fut enchantée de l’attention de M. de Custine et lui en témoigna sa reconnaissance de la manière la plus gracieuse. » Tous partirent le même soir, sauf Closen qui avait retrouvé là l’incomparable Mme Custis et « resta encore le lendemain, étant traité avec toute l’affabilité possible, de la part de ces dames dont la société était, dit-il, on ne peut plus douce et agréable pour moi. » Il prit congé enfin, « séparation assez triste. »

En continuant vers le Nord, avec marches de nuit comme à l’aller, à cause de la chaleur (on se met derechef en route à deux heures du matin), nos officiers notent combien le pays se relève vite. A Wilmington, dit Closen, « on a bâti cinquante maisons de briques, très belles et vastes, depuis notre passage et qui rendent la grande rue charmante. » A Philadelphie, La Luzerne prépare une nouvelle fête plus brillante encore que l’autre : un dauphin est né à la France et le ministre a fait construire exprès une salle très belle par L’Enfant, « officier français, au service du corps du génie, » le même qui devait dresser plus tard le plan de la capitale fédérale et qui repose aujourd’hui au cimetière militaire d’Arlington, sur la colline boisée dominant la ville devenue, grâce à lui, la plus belle des États-Unis.

Le 14 août, Washington et Rochambeau se trouvaient de nouveau tous deux sur la Rivière du Nord et, de nouveau, les troupes américaines étaient passées en revue par le général français ; elles ne sont plus en haillons, mais bien habillées de neuf et ont fort bonne apparence ; leur tenue, leurs manœuvres sont parfaites ; le commandant en chef qui « fait battre par ses tambours, rapporte Rochambeau, la marche française pendant toute cette revue, » est enchanté de montrer ses soldats ainsi à leur avantage ; tout le monde le complimente.


III

A l’automne eut lieu la séparation générale. Rochambeau rentrait en France, et l’armée était envoyée aux Iles sur lesquelles on craignait que ne se portât maintenant l’effort des Anglais. Car, si la guerre était virtuellement finie sur le continent, il en allait

  1. Il en subsiste quelques pièces ; une notamment est conservée au Musée National à Washington.