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fortement inclinées et constituent-elles des surfaces planes le long desquelles des portions de la masse rocheuse peuvent glisser sur les portions voisines. C’est la cause initiale de ces charriages dont tous les géologues reconnaissent maintenant l’efficacité dans la production des chaînes de montagnes. Mais ces mêmes déplacemens déterminent une autre conséquence dont la mention est nécessaire ici. Ils amènent en effet des portions plus profondes, c’est-à-dire plus chaudes, à se superposer à des parties moins profondes, c’est-à-dire moins chaudes. Il en résulte que des masses imprégnées d’eau de carrière sont fréquemment recouvertes par des portions dont la haute température est incompatible avec la persistance de l’eau d’imprégnation. En conséquence, elles éprouvent un recuit qui les fait fondre, en incorporant dans leur substance devenue fluide, et par voie d’occlusion, une quantité de vapeur d’eau, qui leur communique la faculté foisonnante. Dès lors, il suffira que les mouvemens intérieurs dont le sol est animé, leur ménage une issue vers des régions à pression moindre, c’est-à-dire plus superficielles, pour qu’elles s’y précipitent et qu’elles donnent lieu à l’éruption proprement dite.

La vapeur d’eau motrice des matériaux volcaniques dans leur ascension s’exhalera par l’orifice même, sous la forme de fumerolles et, avec elle, les autres principes élastiques ou gazeux que le recuit souterrain des roches aura pu engendrer. Ce seront, dans le cas de roches charbonneuses, des gaz combustibles, comme le grisou ; dans le cas de roches sulfureuses, les acides sulfureux, sulfurique, sulfhydrique ; dans le cas de roches calcaires, de l’anhydride carbonique ; dans le cas de roches salifères, de l’acide chlorhydrique, etc.

Et l’on voit comment ce phénomène, qui apparaît avant réflexion comme essentiellement cataclysmien, se signale, au contraire, comme l’un des détails les plus évidens des harmonies qui dominent toute la physiologie de la Terre[1].


STANISLAS MEUNIER.

  1. Voyez la Revue du 1er juillet 1904.