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avons dit qu’elle est pour lui, au point de vue de l’anatomie du volcan, ce qu’est le cadavre sur la table de dissection pour l’anatomie animale ; elle nous a permis de constater que le phénomène volcanique est de tous les temps et, par conséquent, une nécessité de la vie de la terre. Et, avant d’insister de nouveau sur ce point, par lequel il sera bon de finir une étude surtout consacrée à la France volcanique, il est nécessaire de signaler d’un mot une théorie d’un tout autre ordre, mais qui, elle aussi, a son point de départ dans la considération d’un phénomène doué en Auvergne d’une ampleur toute spéciale, ou plutôt dont la disposition est particulièrement frappante. Nous voulons parler de la lumière que projette sur le creusement des vallées l’allure delà dénudation intempérique à la surface de l’Auvergne.

Visitant ce pays au début de notre carrière, nous avions été frappé de la situation des coulées volcaniques, presque invariablement situées sur les lignes de faîte. C’était l’époque où régnaient les idées de Belgrand sur les violens ruissellemens d’eau, les fleuves énormes et torrentueux, rabotant énergiquement le sol et auxquels on attribuait tous les traits du modelé du sol. Nous ne comprenions pas. En effet, ces eaux auraient dû imprimer, à la disposition générale des reliefs, une orientation dominante qu’on ne constate pas ; en outre, comment, après un tel déploiement de forces, des délinéamens délicats, comme des assises de marnes facilement délayables ou de fragiles placages de peperino pouvaient-ils subsister ? Le cône du Pariou, celui de tant d’autres volcans, auraient dû montrer quelques traces des grandes frictions supposées. Et la liaison intime de l’altitude où s’est arrêtée chaque coulée, avec son âge relatif, comment l’expliquer ?

D’anciens auteurs, Playfair, d’Aubuisson, Poulett Scrope, et avant tous Montlosier, nous parurent avoir eu, bien plus que les esprits systématiques de l’école de Belgrand, le sens vrai des choses. Après les avoir lus, après avoir observé par nous-même, nous constatâmes que le sol de l’Auvergne offre, intimement associés l’un avec l’autre, — d’une part le résultat du phénomène volcanique essentiellement intermittent et qui, à chacune de ses manifestations, a immobilisé, par les coulées de lave épanchées dans les vallées, des portions de profit du sol protégé pour un temps plus ou moins long contre les entreprises de l’intempérisme, — et, d’autre part, les effets du phénomène