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talent généreux, de cette idée, avait su la faire accepter par chacun de vous. (Applaudissemens à droite et au centre.)

Il y a, à l’heure qu’il est, dans l’Assemblée, un véritable désir, je le crois, de régler cette question des églises. Il y a une bonne volonté générale à laquelle je rends hommage. Chacune de ces propositions, par fragmens, vaut quelque chose. Mais pourquoi le Gouvernement ne se prononce-t-il pas, comme c’est son devoir ? Pourquoi s’obstine-t-il dans un mutisme qui finirait par indigner le plus pacifique ? (Applaudissemens à droite. — Réclamations sur divers bancs à gauche.)

Nous avons fait de très grands progrès vers l’accord depuis deux ans. Maintenant, il serait facile de faire accepter par le Parlement un règlement d’ensemble. Je sens bien qu’on répugne à donner raison à un homme politique, dont on ne partage pas par ailleurs les idées, encore que cette fois cependant on approuve sa thèse. Eh bien ! c’est le rôle du Gouvernement d’intervenir et de nous apporter une conception d’ensemble, de donner aux églises une situation légale. Hélas ! le Gouvernement ne se sert même pas des moyens légaux qu’il a entre les mains. Comment, monsieur le ministre, avez-vous toléré l’abjecte indignité que tous nous avons flétrie ce matin et qu’il faut flétrir une nouvelle fois, l’indignité de cette municipalité sectaire qui installe des latrines (Interruptions à l’extrême gauche. — Applaudissemens à droite) dans une tour d’église classée et qui proclame qu’elle est heureuse d’installer, dans un terrain sacré, un temple au dieu du ventre ! (Vifs applaudissemens répétés à droite et au centre.)


L’assemblée flottait, demeurait incertaine. Pour tous les gens d’esprit, pour tous les gens de cœur, j’avais trente fois raison de supplier qu’on classât toutes les églises et qu’on leur accordât, dans certaines conditions, un concours modéré de l’Etat. Certes, oui, j’avais raison. Mais le reconnaître, vraiment était-ce possible ? Un mot, toujours le même mot, dissipa les incertitudes. Quelqu’un m’ayant crié une fois de plus : « Vous voulez rétablir le budget des cultes, » tous ceux qui luttaient contre leur sentiment de la vérité, tous ceux qui n’osent pas sauver les églises, s’efforcèrent de croire à ce misérable mensonge pour y trouver un motif légitime de m’abandonner, et même, fort pitoyablement, le sous-secrétaire d’État, M. Morel,