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RÉFLEXIONS SUR LA FONTAINE

On ne s’était jamais plus occupé de lui que cette année. M. Louis Roche a publié une Vie de Jean de La Fontaine, où il s’est appliqué à corriger les inexactitudes et à remplir les lacunes de ses prédécesseurs. M. Michaut nous a donné la première partie du cours sur La Fontaine qu’il a professé à la Sorbonne. M. Edmond Pilon a écrit un La Fontaine pour la nouvelle Bibliothèque Française. Enfin, M. Faguet a réuni ses causeries qui ont eu tant de succès à la Société des Conférences, et qui, sans faire oublier ses études antérieures, y ajoutent les aperçus d’une improvisation toujours heureuse[1].

Ces livres ont d’abord le mérite qu’ils achèvent de nous « désenchanter » de la thèse où ce dur magicien de Taine, désireux de le grandir, avait surtout raidi le plus souple des poètes. Le pire était qu’elle lui prêtait l’attitude un peu sournoise d’un satirique qui, « contraint dans la satire, » mène contre la société de son temps une guerre sourde d’allusions et d’allégories. Ce n’était pas la première fois qu’on dégageait des Fables une intention de satire politique et sociale. Pour n’en citer qu’un exemple, le Renard, blessé et tombé dans la fange, gémit de se voir en proie aux mouches. Le Hérisson s’offre à l’en délivrer ; mais il le supplie de n’en rien faire.


Ces animaux sont saouls : une troupe nouvelle
Viendrait fondre sur moi plus âpre et plus cruelle.

  1. Louis Roche, La Vie de Jean de La Fontaine ; Plon-Nonrrit. — Bibliothèque Française, La Fontaine, Edmond Pilon ; Plon-Nourrit. — G. Michaut, La Fontaine ; Hachette. — E. Faguet, La Fontaine ; Société française d’Imprimerie et de Librairie.