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LA
PROMENADE À TOMBOUCTOU

I

Ce n’est, maintenant, qu’une promenade, en effet, une promenade pour les moins audacieux des touristes ou des chasseurs. Paquebots luxueux, wagons bien aménagés, bateaux de fleuve complètement pourvus assurent l’aise sur le bleu de l’Atlantique, comme parmi la nature luxuriante du Cayor et du Soudan, comme entre les rives giboyeuses du Sénégal et du Niger où viennent toujours boire, sous le vol de mille oiseaux aquatiques insoucieux des caïmans et des hippopotames voisins, l’antilope, la panthère, le lion.

Cette promenade coûte peu de fatigues. Elle procure, avec les plus beaux agrémens, celui de coudoyer tout vifs, dans leurs cités d’argile blonde, dans leurs villages de grandes ruches fleuries, non des sauvages, mais des peuples anciens et demeurés tels. Deux javelots en main, les Berbères Touareg apparaissent, dans les sables de Niafunké, comme aux temps de la Numidie préhistorique. Les Maures aquilins et nobles rôdent autour de Saint-Louis, la lance de fer au poing, comme en l’ère lointaine des premières immigrations arabes très antérieures à l’Islam. Les Peuhls astucieux de Matam observent, entre leurs cadenettes crépues, le marché du bétail, comme au lendemain des exodes judéo-égyptiens fuyant le Pharaon trompé par Moïse, comme au lendemain des exils judéo-syriens fuyant le Ptolémée Soter, qui